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L'Observatoire

Sérieux comme un jeu d'enfant

"Je sens que les oiseaux sont ivres"
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Sujet lancé par Agliacci
Le 29-11-1511 à 00h11
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Posté par Agliacci,
Le 29-11-1511 à 00h11
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Agliacci

Le Matal 29 Nohanur 1511 à 00h11

 

"- non, je ne suis pas fou ! disait la vague à l’âme
je suis juste surpris d’avoir goûté en vain
votre féminité, mais dites-moi madame
soyons organisés, séparons-nous enfin !
L’âme au corps impatient rétorqua au miracle
- rassurez-vous ami, je suis bien masculin
La vague liquéfiée croyant voir un oracle
dît qu’il fut singulier de se couper du lien
et c’est en se jetant du sommet d’un pinacle
que l’accord se brisa, l’osmose disparût
de ce cerveau liquide, bienheureuse débacle
Leur sort ainsi permît l’usufruit défendu"

.Citation n'ayant rien à voir avec le texte qui suit.



*
Les lunes étaient sereines et jouaient sur les flots.

Tout en haut d’une tour, il y a cette petite silhouette verticale qui évolue dans l’air. Qui danse. Un mirage.

Il est bien tard pourtant mais cela ne semble pas décourager l'apparition qui échange quelques entrechats loin au-dessus de Lerth, sur ce promontoire qu’offre la Tour (« l’Observatoire ? »)
Tout ça pour quoi ? Eh bien, le plaisir du vertige,
L’appel des profondeurs,
La peau d’une étoile,
Quoi, mais enfin, pour tanguer et oser !

Oui, elle est comme ça, Agliacci.
Montrez-lui une tour avec vue sur la mer, service Contemplation assuré, "C'est sérieux, ce qui se passe là-dedans", et vous la retrouvez à trois heures du matin y faisant des pirouettes nocturnes pour le plaisir des astres - les plaies et ires des désastres. Et ceci dans l'insouciance la plus totale.

C’est que l’horizon est juste à portée de cils par ici. Il n’y a rien d’autre à faire que l’observer – le rivage invisible, l’horizon avalé par la masse liquide, les flots noirs à la crête d’ivoire. Oui, juste être là et le regarder. Le défigurer et le scruter, toute la nuit s’il le faut, le lendemain, et tous les jours qui suivent. Dit comme ça, ça n’a franchement pas l’air passionnant. Pourtant cette activité inexpliquée a tout l’air d’occuper une bonne partie de la population des Témoins. Agliacci n’est pas totalement sûre d’avoir encore compris pourquoi, mais à noter leur aller-retour elle s’est dit qu’elle allait s’y essayer, voir ce que ces messieurs dames trouvaient d’intéressant à rester méditer en haut d’une tour gelée. Qu’est-ce qu’ils pouvaient bien se dire à ce sujet ? Qu’est-ce qu’ils pouvaient bien voir qui vissaient leurs pieds aux nuées ? Qu’est-ce qu’ils pouvaient bien en penser ? Il fallait qu’elle sache !

Agliacci n’est pas déçue du détour. La si vive tydale, l’impromptue artiste, l’hédoniste sans le sou semble même s’attacher à l’endroit, à sa solitude verticale et à son silence total. Ce silence, il lui faut l’incarner. Obligé ! Obligatoire ! Dès qu’elle l’a entendu, elle a su qu’elle tenait là une nouvelle chorégraphie à mettre en place. Depuis, elle la peaufine.

Elle a l’air d’une apparition comme ça, dans les reflets des lunes, éclipsant les lueurs et émergeant de l’obscur. Un mirage, un songe, une flamme, intangible et légère, une sirène peut-être, une splendide idiote sans aucun doute. Dans le silence qu’elle ne déchire que par les frottements de ses pieds qui enchaînent les pas de danse, elle est toute entière captivée par l’inaudible. Il ne s’agit donc pas de respirer bruyamment, de faire un mouvement brusque ; attention, aussi, à ne pas chantonner par mégarde ou à rouvrir les yeux - les garder fermés, s'imprégner du vide, le remplir d'un mouvement, mais les mouvements à la manière des mots ne sont pas tous justes, ne sont pas tous derniers, encore faut-il les trouver...Alors elle les cherche.

Le jeu, c’est de parcourir la tour aveugle, sourde et muette, un souvenir pâle, c’es tout, s’est-elle dit. Sans crainte aucune. Elle est funambule de carrière, danse de coeur, le tour est joué, la question entendue, il faut répéter, maintenant, répéter jusqu'à trouver la bonne danse, celle qui, "celle qui quoi ?", on ne sait pas, la bonne danse, c'est tout.
Que voulez-vous, on trouve des fous à toute heure de la nuit...

Quant aux lunes, elles étaient sereines et jouaient sur les flots.


Comme si c'était la dernière fois. La première fois.

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