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Les ruelles de la cité pourpre.

Au travers du vacarme

Accident d'une Centrifugineuse
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Sujet lancé par Tchik
Le 03-01-1511 à 23h45
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Posté par Tchik,
Le 02-02-1511 à 17h13
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Tchik

Le Luang 3 Jangur 1511 à 23h45

 
La Centrifugineuse est une machine extrêmement simple et ingénieuse. Deux grands bassins. Le premier est rempli d'eau. Au centre du second, un énorme rouage duquel partent, des pales de bois. Un mécanisme solide le fait tourner. Et surtout, des ouvriers. Le tout est relié par une tube de metal qui permet ainsi de vider l'un dans l'autre. Vider quoi? des légumes. Des travailleurs arrivent par chariots, transportant des caisses pleines à rabord, d'autres prennent le relais et balancent les contenus dans le premier bassin. Quand ce dernier déborde -le volume s'accroit forcément-, les légumes passent par le tube et arrivent dans le second bassin où les pales tournent déjà et emportent tout dans leur mouvement. Le procédé permet ainsi d'avoir des quantités faramineuses de légumes propres, essorés et prêts à la consommation.

Alors où est le problème?
Le problème c'est qu'en ce soir de Jangur, l'équipe de nettoyage des pales est arrivée un peu plus tard que prévu. Certains quartiers de Farnya sont plus encombrés que d'autres depuis quelques mois. Difficile pour le petit Syndicat du Frère Limon d'envoyer ces gars au four et au moulin, comme on dit. Toujours est-il que les nettoyeurs se trouvaient toujours dans le second bassin quand Guernok -l'ouvrier de garde de la Centrifugineuse- enclencha la "sourdine", petit mécanisme permettant aux pales de tourner et d'échauffer les cordes en torsion qui servent à lancer la machine. Sauf que la sourdine porte mal son nom. Elle est très bruyante. Si bruyante que personne n'a entendu les cris des pauvres nettoyeurs dans le bassin.
Résultat des courses : une équipe de nettoyeurs au complet sur les brancards, plus encore quelques dizaines d'ouvriers qui ont tenté d'arrêter la machine, notamment un qui faillit perdre la main.


Sieur Terenor se faufila dans l'entrepôt, entre les médecins agités et les appels des blessés. Il se dirigeait vers la pièce surélevée au fond de l'entrepôt. Il n'était pas insensible à la tragédie, cependant il avait eu son lot d'accident. Il en connaissait la nature et avait même cherché à comprendre -théoriser- le facteur accidentel dans l'Absolu. La vérité c'était que nul ne pouvait empêcher ces entrelacs d'équations ratées. Ces petits Chaos du quotidien qui font les grands maux de la vie. En somme, il s'était fait une raison.
Tchik était même une preuve qu'on pouvait en sortir vivant.

L'idée ensuite consistait à ne pas gâcher la deuxième chance.
Question de pragmatisme, pur et simple.

Quelques marches d'un escalier très court. Une porte ouverte, signe de va-et-vient régulier. Puis surtout la silhouette de celle qu'il venait trouver. Le Médecin en Chef des Armées. Une sommité de l'ombre qui travaillait en pleine lumière.

Toc, toc toc.



Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Matal 4 Jangur 1511 à 19h37

 
La routine bien mal nommé du rôle de médecin dans la Fraternité bien nommée du Désordre avait quelque chose de rassurant, d'apaisant pour l'esprit de la Commandante, après tout ce qu'elle avait vécu. Partager son temps entre la gestion du matériel et de ses soldats, entre les rapports et les archives, et récemment tout ceci à côté de la pratique de la médecine qu'elle s'autorisait à nouveau, ses mains tremblant moins, tout cela était en quelques sortes sa thérapie. Et, petit à petit, se consacrer à ceux de son peuple lui permettrait de se reconstruire en aidant les autres.

Un bon point pour elle et un mauvais pour tout le reste de la Fraternité était qu'en domaine de médecine, la vie quelque peu torturée des tchaës était une source sans cesse jaillissante de malades, blessés et estropiés, et le travail n'avait jamais manqué dans le Corps de Médecine. Cela était d'autant plus vrai depuis l'exode de la population d'Oriandre.

Ce soir là, un Brancardier était venu à l'entrepot hopital, un de ceux que le Prince avait mis à disposition de la Bulle Noire, pour signaler le grave accident ayant eu lieu dans l'usine légumière, et demander des renforts. La Commandante se préparait à quitter les lieux pour rejoindre le sieur Terenor, l'un des esprits les plus brillaments tchaës qu'elle connaissait, et qui avait exprimé le souhait de lui parler au calme. Peine perdue, avec cette nouvelle, mais la doctoresse lui avait communiqué par pensée l'emplacement de l'intervention, lui proposant de l'y rejoindre.

Elle-même s'était rendue sur les lieux avec l'une des quelques escouades qui constituaient ce qu'elle aimait à appeler "sa garde", ceux parmi les médecins du Corps qui étaient tout autant soldats que médecins, et qui la suivaient sur les champs de bataille, la plupart de ses soldats ne quittant généralement pas les cités, et leurs responsabilités auprès de la population civile. Et la douzaine de petites silhouettes drapées dans leurs capes noires s'étaient engagées dans les ruelles, avec un chariot destiné au transport des blessés graves. Et ils étaient nombreux dans cet incident.

Sur place, quatre membres du Corps étaient déjà à l'oeuvre, et quelques membres d'autres Corps de la Noire s'assuraient que les passages nombreux à cette heure et dans ce quartier ne gênerait pas les soigneurs. Il était impressionnant de voir le désordre se ranger soudain avec discipline lorsque les vies de Frères étaient en jeu. Sur place, la Commandante donna rapidement ses ordres, et se mit au travail, tout comme ses compagnons.

Une vingtaine de minutes plus tard, les choses commençaient déjà à paraitre un peu plus clair, même s'il restait encore beaucoup à faire. Peu auraient à souffrir de graves séquelles, du moins relativement peu au regard du nombre de blessés. Quatre, seulement, auraient peu de chances de retourner travailler avant longtemps, s'ils pouvaient y retourner. Les nombreux autres seraient pour la plupart de retour dans l'usine une quinzaine de jours plus tard. Un sacré retard tout de même pour le Syndicat qui la gérait.

La doctoresse était occupée à bander le bras d'un Frère, pour lui mettre en échape, lorsque les trois coups furent frappés contre la porte. Elle releva les yeux, et adressa un sourire à l'escalier en voyant de qui il s'agissait.

Frère Tarm, appela-t-elle l'Infirmier qui supervisait l'escouade, je te confie le commandement, et le bras de notre frangin, tu veux bien ?

Le tchaë barbu hocha la tête, avec un petit grognement bourru pour signifier son assentissement, et vint immédiatement se mettre à la tâche. La Commandante lui tapotta affectueusement l'épaule, lui souriant, avant d'aller voir son visiteur, qu'elle serra dans ses bras un instant pour le saluer.

Frère Tchik, cela faisait longtemps. Désolée pour l'agitation, mais en fin de compte je n'avais pas plus calme à proposer ce soir. Cette centrifugineuse a causé quelques belles frayeurs à nos Frères Rouges.


 
Tchik

Le Merakih 5 Jangur 1511 à 10h53

 
Sur le visage de Tchik, une totale compréhension. Un sourire aimable.
Et oui, cela faisait longtemps. Une éternité il semblait. Ce qui n'était pas entièrement faux, bien que l'ingénieur gardait pour lui son souvenir hors du temps. Quant à l'agitation, il avait coutume qu'elle soit permanente et de se créer une petite bulle de calme, même bien avant la Symbiose. C'était donc dans sa nature de nager dans le bruit comme si aucun son ne lui parvenait.


Vous m'en devez une, Soeur, n'oubliez pas, dit-il en montrant le patient en train de se faire bander le bras.

Il parlait d'une visite médicale. Et son sourire s'élargit quelque seconde comme pour signifier qu'il s'agissait d'une boutade. Après tout, cela datait de plusieurs mois en arrière et le Sieur Terenor n'avait plus ses maux de têtes récurrents. Peut être aussi que ses expériences symbiotiques avaient évolué. Moins nocives.


Ce sont donc là vos quartiers. Un ancien entrepôt de la Rouge on dirait. Qui sait son histoire?

La question n'appelait pas de réponse, en fait, il tournait sur lui même pour observer les lieux.

Allez savoir, peut être un de nos ancêtres syndiqués qui hurlait ses ordres dans notre belle langue antique.
...vous parlez vous même l'ancien?



Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Merakih 5 Jangur 1511 à 21h04

 
Méfiez-vous, je vais vous prendre au mot et vous servir en pâture à mes jeunes recrues pour qu'elles pratiquent leur art !

D'un geste de la main la doctoresse fit mine d'accrocher la menace de servir de cobaye au dessus de la tête du savant, et la discussion évolua vers un sujet plus sérieux, les origines de cet entrepôt dans lequel le Corps s'était installé. La tchaë, plus habituée à regarder l'aspect pratique d'un bâtiment que son origine, la Bulle Noire favorisant ce regard sur les choses, n'était pas aussi sensible à la question que son homologue masculin.

Et elle fut tout aussi intéressée par ce regard différent sur son lieu de travail de fortune que par la considération suivante, concernant l'ancien parlé de la Fraternité. A la question du sieur Terenor elle répondit en allant chercher une théière pour prendre sa température, et quelques paroles plus en lien avec le sujet.

Je l'ai entendu parler quelques fois, mais j'avoue ne pas y comprendre mot moi-même... En fait, je concède volontiers ne pas être très érudite en matière de langues, la seule que j'ai apprise étant celle de la Confrérie, pendant les semaines passées à préparer la défense d'Arameth à leurs côtés... Je n'ai guère eu l'occasion de me pencher sur les autres, même si je le ferais avec plaisir. Hélas notre époque laisse bien peu de temps aux soldats pour enrichir leur culture...

Elle haussa les épaules, sa vie ne lui déplaisait pas, elle se sentait à sa place, même si elle aurait aimé pouvoir se pencher plus assidument sur certaines études et recherches autres que celles de médecine et d'alchimie, et celles des doctrines militaires, tout ceci n'étant somme toute qu'une formation à son métier.

Parlez-vous nous même cette langue de notre histoire ? Et mon thé a refroidi, vous voulez que je vous en fasse chauffer un ? J'ai envie d'en boire un peu...

La liaison était hasardeuse, mais habituée à jongler entre les affaires du Corps, la liaison avec le reste de la Bulle, les soins et ses préparations qui chauffent, la tchaë avait l'habitude de sauter du coq à l'âne. D'ordinaire elle essayait de faire des efforts en dehors de ses Frères du Corps habitués à ces manières, mais elle ne doutait pas que Tchik la suivrait sans problème.


 
Tchik

Le Julung 6 Jangur 1511 à 00h28

 
Haussement des sourcils, accompagnant une courte respiration comme pour mieux préparer sa réponse tandis qu'il appréhendait la tasse de thé qu'il avait accepté.

...le parler! Disons plutôt que je le comprends bien. Et contrairement à ce que vous dîtes, je suis convaincu qu'il ne faut pas la réserver aux seuls érudits. Si ils étaient les seuls à "bien penser", cela se saurait.

Deuxième boutade et cette fois pour mettre définitivement le débat sur un ton décontracté, sans le carcan des Bulles et des couleurs. Et bien qu'il n'en fit jamais trop l'usage, cette fois l'auto-dérision aurait peut être du bon. Pourtant, Tchik n'était pas venu pour prendre du bon temps et rire à s'en faire éclater la panse. Non, il affichait toujours un air sérieux.

L'ancien c'est le lien avec notre Histoire, Commandant.
Et notre Histoire c'est ce qui justifie ce moment.
On apprend puis on oublie.
L'idée m'attriste, je l'avoue.


Etant donné la moue sur son visage, effectivement l'idée ne lui était en rien agréable. Et pour l'adoucir, il but une gorgée du thé.

Même lors de votre formation à l'Académie, vous n'avez jamais croisé des livres écrits en ancien?

L'insistance du Sieur Terenor n'était même pas feinte. Elle avait un but. L'ingénieur n'était pas devenu un féru des discussions de convenance en l'espace que quelques semaines et quelques mauvais coups télépathiques. Impossible, il était le pragmatisme incarné. Et même si la conversation n'en avait pas l'air, elle participait sans doute à un plus grand objectif. Ainsi était le Frère bleu, on ne le referait pas.

De plus, il arborait un air très intéressé par la réponse qu'allait y donner Aedrenith, alors pourquoi le décevoir?



Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Julung 6 Jangur 1511 à 17h31

 
La première réponse de la doctoresse à la question du savant fut un sourire gêné, qui fut accompagné d'une question toute rhétorique, uniquement destinée à lui faire gagner un peu de temps.

« Lors de ma formation à l'Académie ? »

Aëdrenith savait que sa réponse ne satisferait sans doute pas son interlocuteur, qui semblait attaché à l'ancien parlé de la Fraternité, mais elle répugnait à mentir dans de telles circonstances, elle ne mentait guère qu'à ses patients quand cela pouvait les aider. Elle répondit donc la vérité, cherchant tandis qu'elle la formulait une prise à laquelle se raccrocher.

« Je ne suis pas de Farnya, vous savez, je n'ai jamais été formée à l'Académie... »

Elle but une gorgée du thé qu'elle avait fait chauffer pendant la discussion, trouvant dans le même temps un élement qui pourrait permettre aux deux poussiéreux de poursuivre, car elle était curieuse de savoir où voulait en venir Tchik.

« Mais j'ai déjà croisé plusieurs ouvrages en Ancien, cela dit. Ne serait-ce que dans les archives médicales, au delà d'une certaine dates, toutes les rapports sont écrits en ancien, et il est vrai que ne pouvoir les déchiffrer m'a privé d'une importante source d'informations concernant le Corps que je commande et la santé de la Fraterntié. J'ai aussi déjà dû renoncer à compulser certains traités alchimiques parce qu'ils étaitent rédigés en ancien... »

Elle laissa un sourire plus franc se dessiner sur son visage, et se mit machinalement à jouer avec l'une de ses tresses rousses, la tortillant entre ses doigts. Sa réponse serait sans doute du goût du symbiosé et compenserait sa précédente révélation.

 
Tchik

Le Julung 6 Jangur 1511 à 21h02

 
Il observa Aedrenith quelques secondes et se disait que la télépathie donnait l'illusion du contact fraternel. Mais en fin de compte, après tout ce temps, il ne connaissait pas tant que cela la jeune Noiraude. Elle n'était pas passé par l'Académie d'Oriandre non plus visiblement. Peut être était elle aussi une de ces parvenues de la Symbiose. Pour avoir monté si haut les échelons, elle devait avoir bien plus de talent que la Médecine. D'ailleurs, le Sieur Terenor ne la jugerait pas sur sa formation ou ses racines. Ce serait ridicule. C'est justement pour retrouver celles de la Fraternité qu'il était là.

Alors il ne releva pas la remarque et se contenta de boire son thé.


Je peux vous enseigner les bases, si cela vous dit.

Grande inspiration, lasse et pensive.

Voyez vous, je vois l'ancien comme un tremplin. Un peu comme la Symbiose. Et tout comme je pense qu'il faut responsabiliser les symbiosés, je sais que la construction de notre avenir passera forcément par une meilleure compréhension de notre Passé. Un groupe de symbiosé formé en tchaë ancien et déterminé à déterrer les pépites oubliées du Savoir Fraternel serait d'une grande efficacité. Surtout à la vitesse à laquelle nous progressons.

Étrangement, cette version là de son opinion ne ressemblait qu'à une partie immergée d'un plus grand ensemble. Un simple résumé d'une idée longuement murie et qu'il ne développerait pas gratuitement. Peut être était ce une manière de tester la Soeur Médecin.

Ne serait ce que pour vos archives médicales. Sachez en tout cas, que je peux vous aider.

Il posa la tasse, regarda autour de lui, à la recherche de quelque chose.
Les armoires?
Le bureau?
Le meuble bibliothèque pourvu de plusieurs livres?
Le lit vide destiné aux patients?
Tchik n'en fit pas mention. Puis il revint à son interlocutrice:


Vos archives justement, où sont elles?


Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Dhiwara 16 Jangur 1511 à 21h26

 
La doctoresse perçut le manège du savant, qui regardait à droite à gauche, et en fut amusée. Y'avait-il quelque chose dans le bordel de son bureau qui ne lui semblait pas être à sa place ? Ou qui lui aurait semblé être à sa place mais qu'il ne voyait pas ici ? Elle n'avait-elle pas encore vraiment l'habitude de ce lieu.

A sa question, une lueure de peine se noya dans le regard amande de la tchaë. Les archives lui évoquaient surtout des souvenirs d'Oriandre, où elle avait passé du temps à les compulser. Des souvenirs aujourd'hui douloureux.


« Une partie des archives se trouvent ici, à Farnya. Certaines autres dans les villages, et nous n'avons pas pu tout rappatrier au départ d'Oriandre, il n'y avait pas suffisament de chariots de disponnibles... Je dois m'en occuper bientôt, de nouveaux locaux devraient être disponnibles, le conseil municipal étudie en ce moment la question. Je vais ouvrir un dispensaire, comme celui d'Oriandre, et les archives y seront transferées. »


Comme cela lui arrivait parfois ; souvent, même ; elle se laissa aller à professionnaliser ses pensées. Généralement, c'était au sujet de la médecine, mais elle pouvait également, parfois, se laisser aller à cette petite digression à propos de son rôle d'officier. Elle commença à discourir sur la vie de sa branche de la Bulle Noire.

« La ville est trop peuplée pour que l'organisation antérieure au rassemblement soit suffisament efficace, et... Et bien il y aussi les traditions, le Dispensaire Noir était l'âme du Corps de Médecine, et j'ai à coeur que cette habittude demeure... »


Elle s'arrêta, avec un sourire, se rappelant qu'elle ne parlait pas à ses Frères Noirs, et que ce genre de choses ne devait sans doute pas être la préoccupation du Bleu. Elle en revint à la conversation.

Mais, vous dites que vous pourriez m'apprendre les bases de l'ancien ?... La chose m'intéresse, mais... Avec le temps que me demande le Corps de Médecine, mes horaires risquent fort d'être quelque peu... tardifs... Vous donnez des cours du soir, Frère ?

 
Tchik

Le Luang 17 Jangur 1511 à 10h19

 
Il n'y a pas d'heure pour travailler.
Ni pour apprendre d'ailleurs.

Prévenez moi, tout de même. Que j'ai le temps de prendre quelques dispositions.


Le Bleu se dirigea vers la grande ouverture qui donnait sur l'entrepôt. Il observa en silence, le va et vient. Sans doute imaginait il que le Dispensaire renaissait ici. Par la force des choses, du temps, Oriandre revivrait au coeur même de Farnya.

Redonner forme aux traditions, c'est là tout un combat.
Car derrière les traditions se cachent souvent les fondations de notre Fraternité.
A nous de les retrouver.
Nous, symbiosés.


Et pour cela, il leur faudrait mieux comprendre leur propre Histoire.
Tchik poursuivait sa méditation. Encore des hypothèses, des équations, des alternatives.

A quel sujet?


Vous avez affronté cette chose, à Oriandre?
La Corruption.


La question était courte, mais le Frère était désireux d'en savoir long à ce sujet.


Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Luang 17 Jangur 1511 à 18h38

 
Un frisson s'empara de la tchaë à la question de son homologue masculin. Aëdrenith ferma les yeux, et la peau de son visage se vit soudain blémir. Elle ne s'était pas attendue à voir surgir une telle question dans la conversation, et ne s'y était pas du tout préparée. Oriandre demeurait un souvenir vivement douloureux dans l'esprit de la doctoresse. Elle serra les poings et les dents l'espace d'un instant, comme pour atténuer le léger tremblant qui s'était saisi d'elle.

« J'ai assisté au combat que lui a livré Oriandre, comme tous ceux qui y étaient. »


Sa voix était triste, et elle ne précisa pas que l'évènement l'avait plus durement atteinte que beaucoup de ses sembables.

« Une série de choix qui n'étaient pas les miens ont fait que je n'ai pu essayé de défendre notre soeur... »


Soeur, le terme était sans doute étrange pour parler d'une ville, assurement peu coutumier. Même la doctoresse n'avait rencontré que peu de gens appelant ainsi l'ancienne capitale fraternelle.

« Je... Je reste convaincue que la chose aurait été possible, que nous aurions pu la sauver, mais les évènements ont fait que cela n'a pu être essayé... Pourquoi cette question, Frère ? »


Demandait-elle un nouvel espoir d'aider sa "soeur", ou bien une raison pour faire ressurgir le mauvais passé ? Ou tout autre chose, peut-être, simplement, de l'aide pour parvenir à suivre un cheminement de pensée que le Bleu faisait dans sa tête, sautant en apparence du coq à l'âne.


 
Tchik

Le Luang 17 Jangur 1511 à 23h16

 
Vivre avec son passé. Ou chercher à le corriger. Chacun était confronté à ce genre de choix, d'une manière ou d'une autre. Il pouvait être malhonnête de profiter d'Aedrenith alors qu'elle n'attendait qu'un prétexte pour replonger dans la Cité. Aller tirer elle même les oubliés de la manœuvre, à bout de bras, à bout de force. La Médecin en Chef s'y jèterait à n'en pas douter.
Pourtant, c'est une toute autre motivation qui guidait le Sieur Terenor. D'autres intentions. Non qu'il fut indifférent aux émotions palpables de la Soeur Noire, cependant, il avait lui même ses principes. Ses convictions. La Fraternité devait avançer. Elle "devait". Ce sens là, un soldat était bien placé pour le comprendre.

Là encore toutefois, Tchik ne fit point étalage de ses pensées et se contenta de répondre.


Parce que je médite une idée depuis quelques mois. Parmi d'autres, me direz vous.
Je me demandais dans quelle mesure, il serait possible de pénétrer dans la Capitale. Si il existait un moyen de franchir la Corruption. De l'explorer ou d'en guérir les stigmates.

Peut être qu'un témoin de sa nature aurait une théorie à débattre.
Qui plus est un médecin...


L'allusion n'avait pas besoin d'explicitation. L'idée qui trottait dans sa tête devait reposer sur de solides objectifs. Quel interêt de retourner dans la Capitale? Pour ces archives? Il fallait être fou pour risquer sa peau dans un tel bourbier, tout cela pour du charabia écrit en ancien. Qu'y avait il dans ces archives qui justifient une telle obsession. Car si elle n'était pas visible, les mots du Frère ingénieur la dévoilait légèrement.
Peut être que les archives de Farnya adoucirait ses ardeurs.
A moins qu'il n'y ait une réelle possibilité de retourner à Oriandre.
De voyager dans les effluves...



Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Matal 18 Jangur 1511 à 21h11

 
La doctoresse se tourna vers la petite fenêtre qui éclairait le bureau. Elle s'en approcher, pour regarder à travers elle. Et elle se mit à réfléchir à la nouvelle question, qu'avait à demi posé son Frère. Sa voix, lorsqu'elle répondit, était encore chargée d'émotion, mais s'y était de nouveau glissé la maîtrise de soi de la chirurgienne, qui reprennait lentement le dessus.

« Retarder la corruption d'une cité, l'empêcher, peut-être. C'était sur cela que portaient mes espoirs. Lorsqu'Oriandre était encore notre Soeur, et non notre ennemie. J'avais des raisons de croire, et les travaux des Confrères d'Arameth allaient dans le même sens que les miens, qu'il était possible de lutter contre l'oeuvre du Tark'nal... »


Réfléchissant à mesure qu'elle parlait, la tchaë prit sans vraiment s'en rendre compte une posture qu'elle adoptait souvent, dans ce genre de situation. Mains croisées dans le dos, les jambes légèrement écartées sur leurs appuis, le dos bien droit. Elle regardait le ciel, au travers du verre.

« Mais... Cela aurait demandé de combattre sur le même terrain que ce géant. Et cela impliquait de se tenir au sein de la cité elle-même, vous voyez ? Il s'agissait de l'aider à se défendre, elle avait... hum... Disons qu'elle avait cette capacité, mais sans assez de force, et nous aurions pu lui prêter notre force, et la soutenir... »


Le commandant se retourna, pour faire fasse au savant. Elle semblait désormais de nouveau pleinement maîtresse d'elle-même. Et plus apte à émettre un opinion scientifique qui ne soit entaché d'une part d'émotions.

Et pourtant, même scientifiquement, il s'agissait d'émotion. C'était ce qui rendait la tâche si ardue.


« Il faudrait pouvoir étudier la cité à présent. J'ignore si nous avons nous-même la capacité de lutter contre la Corruption. J'ignore s'il est possible de soigner Oriandre, car oui, dans les symptômes, elle est à mes yeux une sorte de maladie émotionnelle, je vous ai dis que la Corruption marchait vraissemblablement au niveau émotif ? J'ignore surtout si nous pouvons survivre à Oriandre elle-même pour pouvoir l'approcher, elle a tué plusieurs de nos Frères, et essayera de nous tuer si nous nous y essayons. Elle est notre ennemie, à présent... »


Elle alla vers un petit meuble bas, qu'elle ouvrit pour farfouiller au dedans. Visiblement, elle venait d'avoir une autre idée en tête, et semblait décidée à ne pas la laisser trainer.

« Il faudrait... Etudier la chose sur le terrain. Prudemment. Je n'en sais pas assez pour pouvoir me prononcer, mais j'ai ces bases, sur lesquelles travailler. Je connais la corruption, comme tous ceux qui l'ont vécu à Oriandre. Et j'ai pu tirer quelques conclusions communes avec les Confrères. Nous ne sommes pas totalement démunis, mais avant de tenter quoi que ce soit, il reste du chemin à parcourir. »


Elle sortit du meuble deux gobelets de bois ferrés, et une bouteille contenant un liquide rougeâtre.

« Nous manquons d'élements, vous aimez la liqueur ? Je vous sert un gobet ? »


Des considérations quelques peu dérangeantes pour certains esprits lui étaient venues en tête, et face à ce genre de question, elle avait l'habitude d'un peu de cette liqueur fruitée. Un alcool assez commun, assez fort. Elle l'avait machinalement sorti, même si elle ne doutait pas que le chercheur saurait reconnaître une froide logique scientifique d'une pensée malveillante.

 
Tchik

Le Merakih 19 Jangur 1511 à 15h12

 
Cette liqueur arrivait à point. Tchik n'était pas né sociable. Ni réellement asocial. Simplement, les nombres lui parlaient plus et la Symbiose l'avait amené à étudier celles qui régissaient la communication, le contact. Mathématiquement, il devait boire de cette boisson pour continuer le développement de cette équation. Et puis, il y avait le Chiffre. Ce fameux Chiffre. Lorsqu'il l'avait découvert, tous ces agrégats de calculs et d'inconnus lui étaient apparus bien fades. Sans être brisé, ses fondations scientifiques prirent une toute autre allure.
Aussi, sans se forcer, il accepta le verre. Il en avait envie.
Tout simplement.


Il faudrait, comme vous dîtes.
Mais plus que des mots, c'est à la Noire de diligenter une mission en Oriandre.
J'ai eu entre les mains un spécimen cristallin de ce qui se trouve là bas.
Ce n'est pour ainsi dire, rien d'autres que ce que nos soldats trouvent sur les créatures corrompus de Syfaria.
Des cristaux inertes. Excepté qu'ils sont apparus là bas, sous forme d'amas, comme des champignons dans un environnement propice. Nimbé de corruption.

Il nous faut donc plus que des cristaux.
Il nous faut des symptômes.
Des spécimens vivants.
Et plusieurs hypothèses à expérimenter sur place pour, disons, ...protéger un explorateur zélé.


On appelait ça le "vif du sujet". Peut être n'entreraient ils pas dans trop de détails, mais les mots de Terenor ne manquerait pas de faire réagir la Noiraude. Les Médecins ont un devoir de prudence, il serait normal qu'elle réfute ou qu'elle refuse certaines vérités. Elle protégeait la vie, ne la mettait pas en danger volontairement.
Cependant, le Frère Bleu avait pris soin de ne pas énumérer les alternatives qui s'offraient à eux.
Il espérait que la Soeur Aedrenith, entre liqueur et sens du devoir, place elle même les limites.
Les frontières du possible.



Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Merakih 26 Jangur 1511 à 16h39

 
Hélas pour le projet, ce qui faisait douter la doctoresse de sa réalisation à court terme n'était sans aucun rapport avec le mal qui avait rongé Oriandre. BIen plus bassement, il s'agissait de considérations noires typiques. Servant un verre au savant, Aëdrenith répondit, sur un ton sérieux. Malheureusement sérieux.

« Je serais surprise que la Bulle Noire envoie pareille expédition à Oriandre.
En fait, je serais même hostile à cette idée, c'est pour cela que je parlais au conditionnel.
Nous ne pouvons nous permettre un tel projet. Du moins pas maintenant. Plus tard...

Comprennez, il n'y a plus rien pour nous permettre de nous retrancher, là bas. Et dehors, nous sommes des proies.
Il faudrait beaucoup de Frères Noirs pour défendre l'expédition. Donc beaucoup de matériel.
En cette saison, les cols qu'empruntes la route sont bloqués par la neige. La matériel serait difficile à convoyer.
La neige et le froid, d'ailleurs, seraient autant des problèmes pour nos Frères que pour le transport.

La saison, le terrain, les prédateurs, cela représente trop de dangers.

Attendre le printemps règlerait le problème du transport et du froid.
Convaincre les Confrères de nous laisser l'usage de leur comptoir supprimerait celui du retranchement.
Alors la Bulle Noire pourrait se charger de protéger l'expédition du reste.
»


Elle marqua une pause, pour boire à son verre de liqueur. Et pour soupirer. Car cela n'était que le moindre des dangers.

« Du reste autre que la cité elle-même, bien sûr...

Mais ce ne sont là, hélas, que les considérations pour l'expédition même. Il y en a d'autres.
»


C'était vrai. Et c'était un travail qu'elle ne pourrait laisser de côté, car avant de repartir de l'avant, il fallait encore réellement stabiliser la situation. Et l'augmentation de la population à Farnya avait dépassé les capacités locales du Corps de Médecine.

« J'ai besoin de mes effectifs ici, à Farnya, pour l'installation du nouveau dispensaire.
Un entrepôt n'est pas adapté à la médecine, les travaux ont vidé les caisses du Corps.
Beaucoup de matériel de la Bulle a de surcroit été abandonné à Oriandre. Il faudra le racheter.

La Fraternité manque de bras et de moyens pour avancer plus vite, les trois Bulles font ce qu'elles peuvent.
Mais nous ne pouvons investire beaucoup de l'une ou l'autre de ces ressources à cette heure.

Au printemps, cela pourrait être réalisé. Cela donnerait le temps de s'y préparer, et de réunir les bonnes personnes.

A moins d'avoir la capacité de voler comme les nemens, ou celle de passer sous terre comme les natifs, nous n'avons guère d'autres choix.
»


 
Tchik

Le Sukra 29 Jangur 1511 à 09h31

 
Terenor médita un instant avant de répondre.
Le Commandant Medecin avait fait preuve de prudence fermée. Soudainement, sans crier gare. Retranchée derrière les bonnes raisons du gouvernement, du climat et de l'hostilité Syfarienne. Cela ne répondait toutefois pas à l'Hypothèse. Cette attitude de la Noiraude n'était pas de son seul fait. C'était le fruit d'une éducation tchaë au sein des familles et transmise au fil des siècles pour aboutir à ça : garder ses pieds sur un sol que l'on sait stable. Même Tchik reconnaissait la grande Sagesse d'une telle philosophie.

Cependant...


Nous autres, Symbiosés, avons quelques talents. Seulement deux ou trois d'entre nous pourraient effectuer ce voyage et les expérimentations qu'il requiert. Quelques prélèvements, un relevé d'information pour faire une étude comparative, des croquis des spécimens...ce me semble à notre portée.

Du moins, ça le serait d'autant plus si un haut gradé de la Noire -symbiosé de surcroît- s'en portait garant. Un Commandant par exemple.


Qu'ils le veuillent ou non, la Noire avait l'emprise sur certaines décisions désormais. Elle assurait la sécurité de toute la Fraternité depuis toujours, sauf qu'en perdant Oriandre, cela avait pris un tout autre sens. Une toute autre priorité. Les autres Voix parlaient, mais c'était la Noire qui tranchait en dernier. Le travail des Rouges, les excentricités des Bleus, les temps obligeaient les responsables à la prudence. Au choix le plus sûr. Et dans cette équation, la Symbiose était la seule porte ouverte sur le champ des possibles.


Interrupteur Enclenché!

 
Aedrenith

Le Matal 1 Fambir 1511 à 18h39

 
Le visage du commandant se para d'un petit sourire, et elle avala une autre gorgée de liqueur, avant de répondre.

« Un Commandant ? »


Elle secoua doucement la tête, de gauche à droite, en signe de négation.

« J'en vois déjà deux qui soutiendraient ce projet. Le Commandant Artilleur, Toufic, et moi. Le Lieutenant Da'Regh, du Génie, le ferait également. Peut-être d'autres, mais eux ont déjà affirmé leur soutien à une telle tentative d'évaluer s'il était possible de reprendre Oriandre. »


Ce que la doctoresse ignorait, c'était si les autres Bulles étaient également réceptives à cette idée. Pour ceux de la Noire, dont beaucoup des officiers avaient vécu à Oriandre, il y avait un attachement sentimental, mais nombre des dirigeants des deux autres Bulles venaient de Farnya, avaient-ils des raisons pour les pousser dans cette voie ?

« Avez-vous déjà sondé nos Frères symbiosés Rouges et Bleus ? Seraient-ils également de la partie ? »


 
Tchik

Le Merakih 2 Fambir 1511 à 17h13

 
Non, je ne les ai pas encore sondé.
Du moins, pas de manières aussi concrètes.
Mais je sais que tous ne sont pas aussi aventureux que nos soldats.
A vivre dans un atelier ou entre des étagères pleine de livres, l'esprit se cultive, pas toujours le corps.
Je suppose que d'ici le Printemps, j'aurais trouvé les bons candidats pour cette mission.


En répondant ainsi, il confirmait finalement le délai imposé. Comme une échéance bien établie.

A ce propos, il y a point qui me pose problème.
L'environnement d'Oriandre. Au delà d'une batterie de test que j'ai commencé à élaborer, j'ai espoir que nous puissions concevoir une combinaison -ou un artifice sorcier- capable d'y résister. Même temporairement. Afin d'envisager des expéditions de plus grandes envergures. Pour cela, il nous faut collecter bien plus que des spécimens. Il nous faut des informations précises sur les agressions, les blessures, les maux, les syndrômes provoqués par le nuage d'effluve.

Je me disais qu'un médecin serait le mieux placé pour savoir comment obtenir ce genre d'information. Surtout dans ces conditions. N'auriez vous pas une méthode à suggérer?


Encore une idée derrière la tête. Ce tchaë ne s'arrêtait jamais. Un mot cachait une phrase, une phrase caché un almanach. Cette fois, il faisait appel au savoir faire d'Aedrenith. Comme pour trouver une solution alternative à ce qui mijotait dans sa tête. Et puis, les maladies, c'était son rayon à la Noiraude. Elle devait bien avoir une idée de la manière de les observer. Du moins, d'habitude pour y arriver, le Médecin avait avant tout besoin d'un élément : un malade...


Interrupteur Enclenché!

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