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Le Luang 28 Fambir 1511 à 22h00
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| Mettre les choses en perspective, penser, se recentrer... Voilà ce qu'elle avait espéré de son escapade de courte durée dans le désert d'Amaury. Mais elle n'en était revenue que plus furieuse (si cela était même possible), contre elle-même, mais aussi contre le monde entier. Comment ne pouvaient-ils pas comprendre?
Elle avait envie d'envoyer le monde paître, mais elle en avait déjà trop fait. Pour eux, c'était déjà ce qu'elle avait fait. Ce n'était pas du tout le cas pourtant. Mais baisser les bras au premier obstacle? ... Elle n'avait pas été élevée comme cela.
Une voix mielleuse sur le consensus n'avait pas suffi à racheter quelques faveurs. Pas plus que des excès de politesse. Mais qu'à cela ne tienne! Elle foncerait dans le tas jusqu'à obtenir des résultats!
Le Limonaire hein? Et bien soit.
[...]
Deux heures. Au moins. Elle n'arrivait pas à se décider. Que devait-elle revêtir? Quelque chose d'aguichant? De somptueux? D'usé? De banal? Comment donner la meilleure impression pour parvenir à ses fins, sans paraître ni trop pompeuse, ni trop insipide? Trop en faire pouvait être risqué. Déjà qu'on la considérait... elle ne savait pas trop en fait. On ne l'aimait pas. Elle ne comprenait qu'à moitié pourquoi.
Bon, tenue de voyage colorée. Sans ostentation ni modestie. Un voile rouge pour recouvrir ses cheveux. Ainsi, il ne resterait plus que son regard pour envoûter, séduire, convaincre... Bref, pour arriver à ses fins.
Mais elle s'interrogeait encore sur la démarche. Quoi demander? À qui? Elle sentait qu'elle était sur le point de se jeter dans le vide sans corde pour la retenir, ni filet pour amortir sa chute. Elle ne pouvait qu'espérer. Espérer très fort.
Elle soupira avec force avant de se décider. Elle devait faire quelque chose. Il était temps.
[...]
Dans les rues, la tydale avait l'air assurée. En apparence seulement. Car Marei misait beaucoup sur les apparences. Elle n'avait pas grand chose sur lequel miser de toutes façons. Alors sur les apparences.
Elle poussa les portes du manoir du Limonaire. Après la clarté aveuglante de l'extérieur, ses yeux mirent quelques secondes à s'habituer à l'obscurité relative du lieu. Elle s'avança de quelques pas, question de ne pas bloquer le chemin. Puis, usant de quelques talents de comédie, elle prit un air un peu perdu et naïf, espérant attirer la sympathie de quelque passant qui saurait l'aiguiller au bon endroit. | |
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Le Julung 3 Marigar 1511 à 20h27
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| Une légère crainte passa dans son regard. Le chambellan... La froideur de sa pensée ne lui avait rien laissé présager de bon. Mais il fallait bien qu'elle essaie si elle voulait espérer ne serait-ce que peut-être obtenir quelque chose, parvenir à quelque chose. Avancer.
Elle prit deux bûches qu'elle entreprit d'abord de glisser sous son bras, sans grand succès. Il faut dire que la tydale n'était pas très costaude - et c'était là un bien grand euphémisme! Elle les mit donc en travers sur ses deux bras devant elle.
Et moi mademoiselle Rapanii, pour vous servir. Mais appelez-moi Marei.
Elle fît un tour un peu grotesque sur elle-même, le poids de son chargement la déstabilisant légèrement.
Enfin, pas vraiment. Mais j'ai toujours trouvé cette formule charmante.
Elle rit avec légèreté. Quant à sa seconde question...
On ne peut rien vous cacher, cher Edouard de Montejoie.
Elle sourit avec sincérité, marchant avec légèreté à ses côtés.
Elle ne faisait peut-être pas encore partie du Luth, mais il lui semblait compliqué d'expliquer cette situation un peu particulière. Après tout, cela ne saurait tarder. Et puis, elle s'y considérait déjà. Donc ce n'était pas un mensonge. Qu'une simplification de la réalité.
Elle se mit à déblatérer.
Ma mère maniait très bien les mots. J'ai toujours été subjuguée par le pouvoir qu'ils contenaient et par la multiplicité de significations qu'ils peuvent prendre. Mais pour arriver à jongler avec les mots, il faut connaître toutes les subtilités d'un langage. Arriver à former des images. Arriver à atteindre l'imaginaire.
Les mots sont une magie. Une magie de l'esprit. Ils sont la concrétisation de ce que nous sommes, ce que nous pensons. Ils sont...
Ses yeux brillaient d'une passion véritable. Et ses paroles ne tarissaient pas.
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