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Le Julung 4 Marigar 1510 à 03h50
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| Thosen marchait d'un pas décidé en direction des murailles au nord de la cité.
Mais si ses pieds exprimaient à leurs façon une farouche détermination, les pensées du jeune maire restaient confuses.
Les mots de Kysall étaient des mensonges éhontés. Il ne fallait pas en douter, la renégate était au service du P'khenS'sarkh, au service du responsable de tout leurs maux depuis six cents ans et elle même ne voulait rien d'autre qu'assister à leurs souffrances.
Pourtant la douillette présence de ses certitudes ne l'empêchait pas de penser au "et si".
Et ce "et si" était effrayant. Il était le maire d'Oriandre, avait en partie la responsabilité de plus de quatre milles frères et soeurs. Dans son esprit la probabilité que Kysall dise la vérité était infime, mais le risque encouru était bien trop important pour qu'il prenne tout ceci à la légère.
Ils avaient appris que les nemens pouvaient être corrompus. Les cités vivantes. Difficile à avaler sans être incroyable. Non, s'il ne pouvait tirer de conclusions hâtives, ce n'était d'ailleurs pas dans la nature même de sa race, il se devait de tout considérer et prendre des décisions en fonctions des divers possibles.
Démêler les écheveaux n'était pas pour lui. S'assurer que les informations parviennent à ceux susceptibles de le faire et protéger avec ses frères noirs la Fraternité par tout les moyens à leurs disposition, c'était là sa tâche.
Et cela signifiait aujourd'hui réfléchir à comment protéger Oriandre des assauts d'une centaine de milliers d'arkoniens, de légions d'Akrorytars, d'une bande de Furyans enragés ou le S'sarkh seul sait encore quoi.
Tisser des illusions ? Contrôler dans le but de pouvoir empoisonner le moindre point d'eau à moins de cent kilomètres de la cité ? Pactiser avec certaines races sociables ? Les hypothèses les plus irréalisables s'accumulaient inutilement.
Non, pour l'instant, il devait déjà vérifier les murailles de la cité, les faire réparer, ou tout du moins reboucher les infiltrations qui laissaient trop d'eau courir jusqu'à inonder parfois la ville basse, recenser les armes disponibles dans la ville, inventorier les réserves de munitions, les réserves de nourritures en cas de siège.
Et remettre en état les vieilles pièces d'artilleries qui sommeillent dans les arsenaux royaux, vérifier les différentes routes menant à la ville, les cols où les embuscades sont aisées, les versants de montagnes propres à l'éboulement, s'assurer qu'il n'y a effectivement qu'un tunnel qui permette de s'échapper de la ville, investiguer sur les possibilités que le port d'Oriandre leurs offre.
...
Le sel. Ne pas oublier le sel. Constituer des réserves s'il le faut, mais l'approvisionnement reste un impératif... Il fallait donc songer à comment protéger la Confrérie... ou bien comment protéger leur mine s'il devait tomber.
Thosen poussa un léger soupir, toutes ces précautions pour ce qui pourrait se révéler être un pet de lapin.
Mais ces même précautions ne lui coutaient pour la plupart que du temps et de la réflexion, et il serait plutôt content de les avoir prises si le pire devait se réaliser.
Une chose à la fois, les murailles donc...
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Le Luang 8 Marigar 1510 à 03h08
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| Deux pensées nonchalamment envoyées et Thosen attend à présent l'arrivée de Stennar sur le mur nord.
Le tchaë qui longe les remparts a un petit quelque chose de loup de mer, le teint halé, la démarche un peu plus sûre et chaloupée, les semaines passées sur un bateau ont produit leurs effets.
Thosen plisse les yeux à l'approche du Commandant, le salue d'abord doucement de la tête avant de serrer en riant l'avant bras de Stennar, un salut de frères d'armes. Cela fait un bout de temps.
Et à l'heure actuelle, indépendamment même de sa profonde amitié pour lui, le jeune maire aurait été ravi d'avoir le Commandant du Génie à ses cotés.
Alors ajouter le fait que le dit Commandant est son meilleur ami et Thosen sent une partie de son angoisse s'évanouir.
Stennar dirige le corps du Génie, entrainé et spécialisé dans la prise de cités, et si pareille occasion n'a heureusement pas eu lieu d'être depuis des siècles, il sait qu'il risque d'avoir bien besoin des compétences de son frère pour réaliser l'effet inverse, protéger Oriandre d'éventuelles armées extérieures.
Les connaissances de Stennar pourraient se révéler sans prix dans les semaines qui vont suivre.
Et si rien ne se produit, alors ce sera toujours cela de réalisé pour le futur.
Frère... je suis content de te revoir.
Ca oui, sacrément content...
Profonde inspiration.
Bon Kysall nous raconte que des armées de races autochtones ou des bandes de rejetons majeurs ne vont pas tarder à pointer leurs vilains nez devant Oriandre pour nous rayer de la carte.
Je n'ai pas confiance en Kysall mais tu me connais un peu depuis le temps, un tchaë avertit en vaut trois, et j'entends bien profiter au maximum de cette nouvelle supériorité numérique.
La renégate nous explique que nos cités poussiéreuses sont protégées uniquement grâce à l'influence des villes elles mêmes, et j'aimerais m'assurer que ce n'est pas le cas, si tu vois ce que je veux dire...
Montrer aux éventuelles hordes de monstruosités dégénérées des arguments un peu plus physiques, bruyants et définitifs qu'une barrière invisible qui repousse.
La fierté de notre ville c'est de pouvoir équiper, abriter et entrainer une armée digne de ce nom. C'est de pouvoir repousser des agresseurs dix, vingt, cent fois supérieurs en nombre si l'on compte dans nos rangs des tchaës solides et vaillants. Et des armes en quantité suffisante. Nos murs sont inexpugnables depuis six cent ans et abritent une cité qui a fait de la guerre son acte de foi.
Je veux m'assurer que nous sommes capables de protéger aujourd'hui la cité comme nous l'avons fait dans le passé, mieux même puisque la menace est peut être plus formidable encore. Je veux être sûr que les murs tiendront face à des assauts répétés et violents, que nous ne manqueront ni d'armes ni de munitions pour accueillir comme il faut nos adversaires, que les anciens béhémoth d'acier qui sommeillent dans les arsenaux sont capables de se réveiller...
Dans un premier temps déjà !
Qu'est ce que tu en penses ?
Et... comment devrions nous nous organiser selon toi ?
Il sourit à nouveau. L'action, voilà le remède à l'angoisse. Réaliser avec ses frères ce qu'ils peuvent faire à leurs échelle. Préparé ce qui peut être préparé. Considérer la guerre comme inéluctable plutôt que de se perdre en conjonctures. | |
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Le Merakih 10 Marigar 1510 à 23h14
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| Stennar se tenait là, en face de son ami le plus intime. La joie et l'euphorie de leurs retrouvailles fut de très courte durée. Trop courte même.
Il soupira puis invita Thosen à le suivre en haut des remparts. De là, ils avaient une vue su toute la vallée montagneuse qui faisait face à la porte proche du pilier.
C'est le jour qu'on a tous tant redouté.
Tu sais, j'entendais parlé de ce jour quand j'étais gamin. Jamais j'aurais crû le vivre.
Son regard était tourné vers l'horizon. Puis, son éternel sourire tinté d'un soupçon de folie pris place sur ses lèvres. Il se tourna vers Thosen.
Mais aujourd'hui, je remercie Stentor que ce soit avec toi que j'y ferais face, toi, le petit frère que j'ai jamais eut...
Aller, on a pas mal de boulot.
Il s'approcha de Thosen puis lui saisit l'épaule pour lui montrer l'extérieur de la cité, près de la porte.
Nous pourrons combattre avec l'infantrie en dehors de la cité. Ils seront soutenus par nos artilleurs et nos mages postés sur les remparts. Si notre ennemi vien jusqu'içi, ce sera cette porte qu'il attaquera en premier.
Et ne t'en fait pas, il faut juste refaire une vérification complète des remparts pour boucher les éventuelles fissures. Ils nous ont maintes fois sauvés la mise, ils vont pas nous lâcher aujourd'hui j'te le garantis.
En derniers recours, l'infantrie se repliera dans la cité pour commencer ce qu'on fait le mieux : tenir un siège.
Il se tourna vers les tours de défense et les montra du doigt.
Içi, là et là, il y aura des artilleurs. Si besoin est, j'ai quelques tireurs d'élite symbiosés qui pourrons y être postés. Les mages défendrons des remparts.
Il faudra faire très attention içi. Il y aura certainement une tripotée de rejetons volants.
Il se tourna ensuite vers la cité. La vue était imprenable.
Si une brèche dans les murs était faite, on pourrait concentrer l'infantrie dessus pour les repousser en attendant de la combler. Si la cité intérieure venait à être prise... Il faudrait se replier sur le Palais Royal. Il est aussi bien fortifié que le coffre fort d'Ethan Gorgo. Mais espérons qu'on ai pas à faire ca...
D'ailleurs, il faudrait faire pas mal de provisions... Mais je te connais t'as déjà dû y penser...
Il sourit puis commenca à descendre les marches des remparts, Thosen le suivant.
Pour ce qui est du matos, j'ai de quoi faire chez moi et je peux fabriquer de quoi armer tous les Tchaes valides en arme à feux. De simples mousquets feront l'affaire.
J'ai aussi quelques vieux schémas d'armes qui pourraient nous être utiles mais... Il me faut plus de temps pour les décrypter et apprendre à les reproduire. Certains ne sont même pas stables une fois finis...
Pour les munitions, l'armurier doit déjà être en train de faire son possible. Au pire, il faudrait qu'on passe le voir.
Il se tourna vers Thosen.
Alors Frero, t'as des idées à ajouter ?
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