Labeur et profits.
C'était la phrase fétiche du patron, une sorte de ligne de conduite soumise à interprétations mais sous entendant que tout travail mérite salaire, et que toute paye doit être consécutive d'un travail honnête.
C'est avec cette idée en tête que j'avais attaqué le travail à mon arrivée à Oriandre, sans avoir vraiment le temps de m'extasier sur l'architecture, ou sur les différences avec Farnya.
Je n'avais pas décroché de tâche sérieuse, juste des petits boulot que me permettait mon statut dans la bulle rouge : le bas de l'échelle. Mais cela ne faisait pas partie des choses qui pouvait entamer mon enthousiasme. Ainsi trois chaises cassées et un panier percé plus tard un militaire s'approchait de moi, plus ou moins discrètement.
Il me demanda s'il y avait moyen d'enchanter son arme, j'oubliais instantanément son nom et lui demandais de me la monter.
Il me tendis alors une lourde hache dont la lame était forgée en double-tranchant, j'imaginais un instant le soldat en pleine bataille, tranchant la tête d'un brigand avant de retourner son arme contre le fourbe qui tentait de l'attaquer dans le dos.
L'arme était de bonne facture et en bon état, mais je ressentais sa jeunesse, il allait falloir remédier à ce manque d'expérience, le défi me plaisait.
Alors que j'étudiais la physionomie de l'arme, histoire de savoir vers quoi l'orienter, j'expliquais ma théorie au lieutenant (ouais, c'était un lieutenant) sur les Essences Fondamentales et sur l'Esprit de la Machine.
Sans illusions, je me doutais qu'il serait au mieux dubitatif, ce qui fut le cas. Il me sortit les lieux commun habituels "l'enchantement c'est de la magie, et puis voila" "les objets n'ont pas d'âme, seul mon bras lui donne sa force blabla et blabla", enfin ce que tout le monde sortait sans trop se poser de question.
Mais je ne lui en tenait pas rigueur, après tout il suffit amplement à un soldat d'avoir une arme fiable, le pourquoi du comment lui échappant, l'explication la plus simple à ses yeux est évidement la meilleure.
Je n'insistais pas, mon travail était de communier avec l'Esprit de cette hache, et une dispute l'aurait certainement contrariée. Pendant que mon client repartait surveiller les remparts, je me lançais dans la-mystérieuse-opération-magique-qui-rend-les-armes-plus-mieux.