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Auberges et Tavernes

Le chambellan et la propage

(Le confrère et la témoin, le poilu et la petite, c'est selon...)
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Sujet lancé par Antiorn
Le 02-12-1508 à 00h31
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Posté par Nelle,
Le 09-01-1509 à 18h49
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Antiorn

Le Matal 2 Dasawar 1508 à 00h31

 
*** Antiorn déambulait. Il adorait déambuler. Le fait qu'un grand nelda blanc ne passait pas inaperçu à Oriandre n'était pas pour lui déplaire. Ses pas le menaient inexorablement à tourner autour de l'Améthyste, son premier contact avec la ville il y avait ce cela maintenant bien des mois. Son huis-clos avec Aarkin et Noril dans l'intimité d'une alcôve avait porté des fruits dont il n'était pas peu fier.

Le chambellan s'amusait donc à noter les réactions des tchaës à sa présence lorsqu'une vision familière tomba dans sa mire. La propage Nelle. Il fallait dire que d'une certaine façon, cette tchaë détonnait parmi les tchaës. Elle l'avait vu et ce, bien avant qu'il ne la parçoive dans la foule. Et pour cause, il dépassait cette foule d eplus d'une tête.

Gracieusement le chambellan s'inclina. ***


Je vous salue, propage Nelle. Vous me voyez comblé de vous trouver ici. En tant qu'étranger, je dois avouer que trouver compère me réjouis. Je vous offre un verre, un thé, une chanson, un poème ou un conte ?

N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Matal 2 Dasawar 1508 à 17h03

 
Nelle aperçoit effectivement le grand nelda au pelage clair d'assez loin, lui qui fait presque le double en hauteur de la population locale, elle comprise.
Elle se dirige vers lui, et lui rend son salut d'un hochement de tête et d'un sourire, plus sobres, mais non moins gracieux.

Etrangement, bien que ses échanges avec le Chambellan aient été rares et aucunement personnels, concernant les agissements de Flymeur au sein de tout un groupe de réflexion, ou plus récemment lors de cette expédition au nord de Motabé, Nelle se sent curieusement intriguée par le nelda...
Malgré le fait que ses seules rencontres av
ec des membres de la Confrérie n'aient pas forcément été complètement positives, et chaque fois on ne peut plus retorses, ce confrère-ci dégage un quelque chose d'un peu plus... ou d'un peu moins... Enfin bref, c'est sans arrière-pensée que la jeune tchaë hoche la tête une seconde fois en signe d'acquiescement, et répond avec chaleur :


Oh, vous pouvez vraiment offrir tout cela ? Je serais bien sotte de refuser une telle offre !
Allons-y pour un thé plutôt qu'un verre, pour le reste j'accepte sans réserve !


Oui, indéniablement ce nelda a quelque chose de rafraichissant, songe-t-elle en se tournant vers l'auberge devant laquelle leur rencontre se déroule...

 
Antiorn

Le Julung 4 Dasawar 1508 à 00h02

 
Je suis Confrère et chambellan caravanier. Je vends du rêve car le rêve, dans toutes ses contradictions et dans toute son irrationalité, est ma passion. Pour vous, je ferai de cette passion un partage. Ainsi, à la suite de notre rencontre, je l'espère, nous aurons tout deux quelque chose de nouveau à offrir au monde.

À l'Améthyste, donc !
,
*** lança le chambellan avec entrain. Tournant les talons, il fendit la foule aisément, créant un sillon derrière lui dans lequel Nelle put facilement manoeuvrer. Arrivé devant la porte de l'auberge, il l'ouvrit d'une main puis laissa la propage pénétrer en premier.

L'endroit, pour un nelda était étroit. Le blanc nelda devait se courber l'échine pour se déplacer, ce qui lui donnait un air relativement grotesque dont il était parfaitement conscient. Ainsi, il arborait fièrement un sourire en coin. Il navigua à travers l'endroit pour choisir une table près du feu. Là, il posa quelques girasols sur la table afin d'attirer le tavernier et commanda une simple théière replie d'eau chaude. La chose faite, il se tourna vers la témoin. ***


C'est ici que j'ai rencontré pour le première fois le propage Samael. Nous avons ensuite fait route ensemble jusqu'à Arameth et je lui ai arrangé une permission pour intégrer la ville.

J'ai toujours nourri une certaine fascination pour les vôtres.


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Julung 4 Dasawar 1508 à 00h30

 
La grandiloquence du discours du chambellan caravanier laisse la jeune tchaë quelque peu interdite, et pour tout dire impressionnée.
Quelque chose de nouveau à offrir au monde ? Whaaou, ça promet ! Songe-t-elle en lui emboîtant le pas à l'intérieur de l'auberge.

Une fois confortablement installée sur une chaise près du feu, allégée de son épais manteau de fourrure -que la soudaine chute de température l'a obligée à adopter bien plus tôt que d'habitude- Nelle se met à l'aise, et d'autant plus lorsque le nelda mentionne le propage Samael.


Oh, ainsi vous connaissez messire Samael ? On dit effectivement que décrocher une autorisation pour visiter la perle du désert est une véritable gageure... un comble pour une cité à moitié peuplée d'immigrés.
Je vous avoue que la Confrérie exerce également une certaine fascination à mon encontre... Enfin, teinté de perplexité je dois dire...

Mais je suis curieuse d'entendre votre avis sur notre communauté... Qu'avons nous donc de si fascinant à vos yeux ?


Knüt dit :


Ben... Il vient de te le dire : il a rencontré Samael... On n'en ressort jamais indemne...


Knüt, commence pas... J'aimerai bien, s'il te plait, pouvoir tenir une discussion sans que tu viennes à un moment ou un autre me mettre dans l'embarras par tes remarques désobligeantes...

Knüt dit :


Désobligeantes ? Pfff...


 
Antiorn

Le Julung 4 Dasawar 1508 à 17h49

 
*** Le chambellan, lorsque la théière arriva sur la table, empoigna un petit sac de cuir de sous sa table et en sortit des herbes séchées qu'il mit à infuser. ***


Une concoction artisanale de chez moi. N'ayez crainte, elle est sans effet, si ce n'est de fouetter légèrement le sang. L'art du thé est soigneusement cultivé dans l'Amody.

*** Puis, pour répondre à la question de la propage: ***


Les confrères sont un étrange amalgame de paradoxes, je vous le concède. Et ces paradoxes nous fascinent. Nos contes se terminent en ouverture sujettes à interprétations, notre art est à double sens, notre existence est contradictoire. Voilà ce qui arrive lorsqu'on choisit de vivre dans l'endroit le plus inhospitalier et qu'on en fait sa demeure douillette. Arameth est un rêve en plein désert. La vie à travers les cendres.

Le paradoxe que je vois en vous est celui de l'unité et de la liberté totale de choix. Cette façon dont vous appliquez une doctrine unique aux vôtres tout en la rendant très personnelle. Vous êtes multiples et vous ne faîtes qu'un. Là est un paradoxe intéressant. Bien que la Confrérie est en paroles basée sur ce concept, les intérêts personnels l'emportent le plus souvent. C'est le morcèlement du pouvoir en différentes horloges qui peuvent entrer en conflits qui fait en sorte que le plus d'intérêts personnels sont respectés en bout du compte. Le bien de la majorité d'individus, mais pas tout à fait le bien du collectif, comme chez vous.


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Sukra 6 Dasawar 1508 à 00h10

 
Nelle sirote son thé en écoutant la réponse du chambellan, s'amusant un bref instant sur le fait que l'art du thé est soigneusement cultivé en Amody, bien que ce soit sans doute le dernier endroit où le thé lui-même est cultivé...
Mais ce que cette simple affirmation éveille surtout chez la jeune tchaë, c'est l'analogie avec sa visite chez l'artisan Tick'an au fundeq, quelques jours avant l'expédition dans les montagnes...
L'art du thé à la confrérie... une simple habitude de s'approprier un peu de la culture des autres communautés de l'île, ou bien... un rituel consistant à paraître accueillant, social, simulant le partage -comme le partage d'un moment simple et agréable autour des arômes doux et savoureux d'une fumante tasse de thé- pour endormir la méfiance, mettre en confiance... et au final mieux manipuler son interlocuteur... ?

L'analogie est d'autant plus troublante que, bien que le connaissant à peine et de façon très superficielle, le nelda lui inspire déjà une indéniable sympathie. Tout comme c'était le cas avec Tick'an...


Knüt, pitié... voilà que je deviens parano...

Knüt dit :


Mais non ma p'tite, t'as raison !
Il a l'air bien trop gentil pour un confrère... C'est louche !


Nelle soupire intérieurement, puis se recentre sur ce que lui raconte Antiorn.

C'est vrai, répond-elle enfin lorsqu'il a fini de parler, vous connaissez manifestement plutôt bien ma faction, vu l'analyse que vous en faites.
Cependant, faut-il vraiment y voir un paradoxe dans cette unité et cette grande liberté simultanées ? L'une fait l'autre, et réciproquement...
En tout cas, bien que je connaisse peu votre faction, ce que vous m'en décrivez me semble renforce la vague impression que j'en ai... Une somme d'individualités oeuvrant, en façade, pour une communauté. Ainsi voilà ce qui aurait tendance à m'intriguer et à éveiller ma curiosité, chez les vôtres : ce que cache cette façade...


 
Antiorn

Le Dhiwara 7 Dasawar 1508 à 19h24

 
*** Le chambellan sourit, visiblement satisfait de la tournure de la conversation. Les banalités d'usage avaient été évitées et on se trouvait dès lors en plein débat idéologique. L'intérêt qu'il portait en la propage était déjà récompensé. Il avait trouvé une parcelle de poussière avec qui partager. Avec qui il désirait partager, ce qui était d'une rareté précieuse.
***

L'illusion doit-elle être une facade ? Ne peut-on pas considérer la chimère comme une matière première en soi ? Nous sommes faits de rêves car on nous a donné un rêve à chérir: Arameth. À ce titre, nous sommes cousins avec les habitants de Korsyne. Nous vivons là ou la vie n'a que peu d'emprise. Nos rêves sont certes différents. Mais nous rêvons, nous aussi. Nous rêvons de rêves personnels faute de posséder un Grand Rêve auquel nous rattacher. Notre grand rêve à nous est fait de poussière luttant pour engendrer le beau avec du sable. Nous sommes un peuple d'idées et d'identitées multiples pourtant uni. Uni par ce rêve qu'est la Confrérie des Six. Tout comme vous êtes unis par ce rêve d'aborder le S'sarkh et d'y trouver sagesse.

Sans rêve, la vie n'a rien à quoi s'accorcher. Elle perd son sens.

Mais je m'écarte de mon offre, bien que la discussion soit des plus passionnantes. Je vous offre un conte de chez moi, de Jypska, un peu de musique, un poème ?

Choisissez et vous aurez. Et j'espère humblement que vous m'offrirez un récit de chez vous, qu'à travers nos deux êtres un rapprochement puisse se créer que nous répandrons par la suite.


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Luang 8 Dasawar 1508 à 23h01

 
Oh, certaines illusions sont bel et bien des façades, j'en suis persuadée...
Mais sur ce point je suis d'accord avec vous : les rêves sont nécessaires pour unir comme pour avancer...


Nelle sourit, boit une nouvelle gorgée de son thé, puis ajoute avec espièglerie :

Un conte, de la musique ou un poème... Vous êtes cruel de me demander de choisir, Chambellan, vos trois offres sont toutes également attractives !

Allons-y pour un conte de chez vous : faites-moi donc partager un peu de vos rêves...
Et bien que mes talents de conteuse soient relativement modestes, j'essaierai d'honorer du mieux que je peux votre demande en retour.


Sans quitter le nelda des yeux, les oreilles grandes ouvertes, la jeune tchaë se ressert une tasse de thé et s'installe un peu plus confortablement dans son siège, à l'affut de son récit.
Nelle est friande d'histoires, Antiorn ne pouvait pas trouver meilleure cliente, en réalité.

Le troc d'histoires ou de poème est pourtant bien la dernière denrée qu'elle s'attendait à trouver dans les rayons d'un caravanier de cette faction. Pourtant, partager du savoir enrichit bien plus que lorsqu'il s'agit de biens tangibles, de ce point de vue là encore elle est tout à fait d'accord avec lui...


 
Antiorn

Le Merakih 10 Dasawar 1508 à 00h39

 
*** Antiorn nonchalament sourit et s'adossa sur sa chaise. ***


Bien. Ce compte en est un qui circule depuis belle lurette dans l'Amody. C'est aussi celui que j'ai offert à Samael lors de notre rencontre autour de ce même feu. Il est une fenêtre sur l'imaginaire confraternel: fin ouverte, thème de rêve de d'illusion, morale ambigüe.

Dans un oasis du désert d'Amody
Au nom aujourd'hui oublié
Un village avait pri vie
Et avait prospéré

Ses habitants étaient solides
Ses habitants étaient fiers
Dans le désert aride
Un vilage de fer

Contre créatures et rejetons
Contre sables et vents
Tous à l'unisson
Contre tourments

Dans cet improbable endroit
Une fleur avait poussé
Dans ce village dur et droit
Une princesse était née

Fille se soleil éblouissant
Aux cheveux d'étoiles
La peau du plus pur blanc
Drappée de voiles

Chacun la convoitait
Mais la belle était demandante
D'un gage de qui la voulait
De sa flame ardente

Cette beauté d'acier
Ne se donnerait qu'à
Qui la ferait toucher
Une étoile de ses doigts.

Maints partirent en quête
De cet improbable présent
Se mettant en tête
De piller le firmament

Tous bredouille revinrent
Maudissant les conditions
Qui toujours retinrent
À elle leur union

Mais un jour un vagabond
Un barde errant
Eut vent de la rançon
Qu'aurait le gagnant

Le jour fit un radeau
La nuit la Belle convoqua
Que les reflets d'astres sur l'eau
Elle touche de ses doigts.


*** Le récit terminé, il porta sa tasse de thé à ses lèvres en attendant la réaction de la propage. ***


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Julung 11 Dasawar 1508 à 13h00

 
Nelle écoute, presque extatique, le récit rimé du chambellan. Au fur et à mesure de celui-ci, les conversations se sont d'ailleurs tues peu à peu aux tables alentours, et la jeune propage ne constitue plus le seul public du paisible nelda.
Nelle se retient d'applaudir à la fin, mais lui sourit franchement, les yeux brillants d'émerveillement.

Oh, merci ! C'est vraiment très beau !

Elle boit quelques gorgées de thé, l'air un peu songeuse, entretenant un peu plus longtemps la magie de l'imaginaire qui suit le récit.
Puis relevant ses yeux ambrés vers Antiorn, elle sourit de nouveau et se lance, après quelques regards intimidé vers les tchaës qui se sont imperceptiblement rapprochés, devinant ou du moins espérant un autre récit.

Nelle n'est pas très à l'aise à l'idée de raconter ainsi devant tant de monde, mais songe aussi que cette curiosité et attention inhabituellement ingénue de la part de frères du désordre est une formidable occasion... Non pas de leur servir un discours prosélyte, comme beaucoup pourront sans doute le croire, mais une simple vision d'espoir... Elle réfléchit quelques instants, puis reprend la parole :


A mon tour alors, de vous offrir une histoire que me racontait parfois ma nourrice pour m'endormir le soir :

Un dernier regard quelque peu angoissé, une grande inspiration, puis la jeune tchaë se lance :

Dans une époque lointaine, vivait en bordure de la Scintillante un pêcheur tydale modeste dont l’histoire n’a pas retenu le nom .
Cet homme avait depuis longtemps dépassé ses vertes années, et le corps vieilli par l’oeuvre du temps et d’une vie entière de labeur, il ne pêchait plus que dans le but premier de subsister.
Il ne s’enfonçait plus guère que dans les eaux peu profondes, restant au mieux à quelques centaines de mètres des côtes, et ne s’aventurant en mer jamais bien longtemps.
Évidemment, ses filets et ses lignes ne ramenaient que peu de poissons, tout juste de quoi manger, et seulement en de très rares occasions il obtenait un petit surplus qu’il allait donc vendre sur le marché ou troquer contre du beurre, du fromage, du riz ou de la farine…

Un soir, lassé de cette fin de vie faite de privations et de pauvreté, d’une rudesse injuste à ses yeux, pour lui qui avait toujours servi avec une fidélité dévouée S’sarkh et la communauté, il adressa une prière à son dieu.
Une prière simple et anodine, comme bien des fervents de Lerth en faisaient souvent, au temple ou aux champs, le matin ou le soir… Une prière anodine où il demandait simplement que ses conditions de vie s’améliorent, juste un peu…

Le lendemain alors que depuis plusieurs heures déjà ses lignes restaient désespérément immobiles, l’un d’entre elle s’agita soudain avec violence.
Le vieil homme se redressa aussitôt dans sa barque, et tira pour remonter ce qu’il espérait être son dîner du soir… Il avait déjà oublié sa prière de la veille et ses rêves fantasques d’une vie plus douce, ne pensant en cet instant qu’à là pesée du poisson qu’il avait ferré…
Quel ne fut donc pas son étonnement lorsqu’il sortit de l’eau un poisson non seulement plus gros et plus grand que ce qu’il avait jamais pêché, mais surtout littéralement fait d’argent ! Car les écailles de l’animal brillaient comme jamais sous les rayons du soleil, formés de l’argent le plus pur et le plus poli qu’il ait été donné au vieux pêcheur de contempler.
Un instant abasourdi, il se rassit dans sa barque, contemplant l’énorme poisson scintillant sur ses genoux, quand soudain celui-ci s’adressa à lui :

« Pêcheur, relâche-moi et remets-moi à l’eau! Si tu me libères, je te promets que demain les poissons rempliront ton filet et que tu feras le meilleur festin de ta vie !

Le vieux pêcheur fut fort surpris, il eut même un peu peur. Il pêchait depuis des dizaines d’années et n’avait jamais été soumis à telle situation. Il le remit dans l’eau en lui disant :

« S’sarkh t’accompagne, poisson d’argent. Va tranquillement dans la mer bleue et profite de ta liberté. »

Le soir, lorsqu’il retourna chez lui, les mains vides, et qu’il raconta son étonnante aventure à sa femme, elle se fâcha.

« Vieux sot ! Et qu’allons-nous manger maintenant ? Tu es vraiment idiot, nous aurions pu faire un grand repas et tirer un bon prix en revendant ses écailles d’argent ! Et toi tu ne trouves rien de mieux que de le remettre à l’eau ?! »

Le lendemain, de retour sur sa barque, alors que depuis plusieurs heures déjà ses lignes restaient désespérément immobiles, l’un d’entre elle s’agita une nouvelle fois avec violence.
Et c’est cette fois-ci un poisson non seulement un poisson encore plus gros et plus grand que ce qu’il avait jamais pêché, mais surtout littéralement fait d’or ! Car les écailles de l’animal brillaient de mille feux sous les rayons du soleil, formés de l’or le plus pur et le plus lumineux qu’il ait été donné au vieux pêcheur de contempler.
Encore plus abasourdi, il se rassit dans sa barque, contemplant l’énorme poisson doré sur ses genoux, quand soudain celui-ci s’adressa à lui :


« Pêcheur, relâche-moi et remets-moi à l’eau! Si tu me libères, je te promets que demain les poissons rempliront ton filet à le faire déborder et que tu mangera comme jamais pendant toute une semaine ! »

Le vieux pêcheur hésita, se rappelant la colère de sa femme et son jeûne de la veille, puis finalement il le remit dans l’eau en lui disant :

« S’sarkh t’accompagne, poisson d’or. Va tranquillement dans la mer bleue et profite de ta liberté. »

Le soir venu, lorsqu’il raconta sa nouvelle aventure à sa femme, elle se fâcha encore plus noir que la veille.

« Triple idiot ! Et qu’allons-nous manger ce soir encore ?! Tu es vraiment d'une stupidité inconcevable, nous aurions pu faire un vrai festin et retirer une petite fortune de ses écailles en or ! Nous pourrions être riches à l'heure qu'il est !
Et toi tu ne trouves rien de mieux que de le remettre à l’eau ?! J'arrive à peine à y croire ! Comment ai-je pu épouser un tel imbécile ?! »


Le lendemain, de nouveau sur sa barque, le ventre criant famine, une de ses lignes s’agita une nouvelle fois avec une violence encore plus spectaculaire.
Le poisson que le vieux pêcheur sortit laborieusement de l’eau cette fois-ci était encore plus énorme que les deux précédents, mais surtout littéralement fait de diamant ! Car les écailles de l’animal renvoyaient de toutes parts les rayons irisés du soleil, chacune se parant d’un petit diamant de la plus grande pureté.
Complètement dépassé, car jamais il ne lui avait été donné de contempler une telle richesse, le tydale se rassit dans sa barque, l’énorme poisson de diamant sur ses genoux, quand soudain celui-ci s’adressa à lui :


« Pêcheur, relâche-moi et remets-moi à l’eau! Si tu me libères, je te promets qu’à partir de demain et jusqu’à la fin de tes jours les poissons rempliront ton filet à le faire déborder et te rendront prospère et bien nourri ! »

Le vieil homme hésita longuement cette fois-ci… Depuis deux jours ses pêches lui promettaient de bien manger en échange de leur vie, pourtant son ventre restait plus vide que jamais. Alors que les diamants de ce poisson feraient assurément sa fortune !
Finalement, il le remit pourtant à l’eau en lui disant :


« S’sarkh t’accompagne, poisson de diamant. Va tranquillement dans la mer bleue et profite de ta liberté. »

Lorsqu’il raconta cela à ça femme une fois rentré chez lui, elle prit ses affaires et partit.

Mais depuis ce jour, les pêches du vieux pêcheur furent toujours abondantes, et il termina sa vie prospère et bien nourri.



Nelle s'arrête alors de parler, la gorge un peu sèche, et sourit timidement, le visage délicatement empourpré...


 
Antiorn

Le Vayang 12 Dasawar 1508 à 19h44

 
*** Le chambellan resta figé tout le long de l'exposé de la tchaë, les yeux pétillants. En aucun instant elle ne douta que tous ses sens étaient projetés vers elle. Il s'attelait à suivre le rythme du récit, des mots, des voyelles. Il nageait sur la ponctuation, s'imageait le récit, se l'imaginait. De par tous ces procédés, il l'inscrivait en sa mémoire de la façon la plus précise qui soit. Au moins trois fois avant de se mettre au lit il se le répétrait. D'ici trois jours, ce récit deviendrait le sien.

Lorsque la propage eut terminé, il applaudit à son tour, un sourire sincère aux lèvres.
***

Je vous remercie, Nelle. Ce récit traversera maintenant les routes avec moi et s'arrêtera dans chaque ville qui accueillera mes baggages, que tous puissent goûter une parcelle de votre culture.

Si vous le permettez, je poursuivrez cet échange par un récit qui me fut donné d'entendre dans des circonstances personnelles. C'est un récit qui me fut donné d'entendre de la bouche de mon cousin, Thécléote d'Edmyon, maire de Jypska, à la veillée funèbre de notre grand-mère à Jypska. Il est d,usage là-bas qu'un veilleur soit désigné pour cette nuit de recueillement et que trois récits soient offerts mettant en relation la vie du ou de la disparue et les trois Pilliers Haut-Rêvants. Ce récit traite de ma grand-mère Layne, que j'ai trèe peu connu, et de Grior, la durée.


*** Sur ce, le blanc nelda se leva et fit face à la curieuse assemblée qui s'était formée dans l'auberge. Surpris que des tchaës de la Fraternité puissent s'intéresser à des récits étrangers, il n'allait cependant pas laisser glisser cet auditoir difficile. ***


Layne était une grande chasseresse. Adolescente, elle partait avec sa mère dans le désert et l'assistait tandis que cette dernière traquait sa proie, plusieurs jours d'affilée, de dunes en oasis, de sebkhras en mesas, le long des oueds asséchés, attentive à ne pas se laisser piéger par les marées de sable...

A l'âge adulte, elle devint guerrière, mais sa passion pour la chasse ne faiblit jamais. Sans déroger à ses devoirs et à sa tâche, elle persévéra, arguant de sa compétence et de son efficacité. Ses qualités naturelles de prédatrice, alliées à sa sagesse, faisaient merveille. Grâce à elle, bien des expéditions purent se dérouler sans drame, dans des régions où se procurer du gibier pouvait rapidement tourner à la catastrophe... dans des lieux si mal famés que le gibier n'était pas celui qu'on croit !

Lorsqu'il fut temps pour elle de renoncer à la garde, lorsque la transmission de ses savoirs prit le pas sur leur mise en œuvre, Layne s'orienta très naturellement vers l'enseignement. Ses deux filles furent bien sûr les récipiendaires privilégiées de ses cours, mais figurez-vous qu'un jour...

Un jour, alors qu'elle avait très largement dépassé son premier siècle d'existence, elle vint trouver Thécléote, son petit-fils. Elle vint le trouver et lui demanda s'il avait jamais assisté à une partie de chasse.

Il lui répondit que non, et qu'en réalité, il n'était guère amateur de ce... sport. Malheur ! Que n'avait-il dit là ! Elle le regarda comme s'il avait hurlé sous sa tente et, bien décidée à l'édifier malgré tout, poursuivit posément en affirmant que la chasse exaltait les quatre piliers de la foi. Thécléote prit cette remarque comme un petit défi, et lui demanda alors en quoi Grior, par exemple, pouvait sortir grandi de cette activité. Il était tout jeune moush'tin, mais plutôt imbu de sa personne : que pouvait donc lui apprendre Layne, sa guerrière de grand-mère, sur l'Ordre ? Il était un mâle, un futur haut-rêvant... Aussi respectable soit son aïeule, il avait une idée peu flatteuse de sa connaissance en matière de dogme !

Layne le regarda avec un drôle d'air. Au cours de la nuit, bien avant l'aube, elle vint le réveiller et le sortit du lit sans bruit. Elle était habillée comme pour la guerre, du moins, c'est ce qu'il cru. En fait, elle partait en chasse, et l'emmenait avec elle.

Elle n'avait prévenu personne, et surtout pas ses parents, qui auraient fait un scandale ! Thécléote était moins âgé que sa fille aujourd'hui... vous imaginez la scène ? Le portant sur ses épaules, qu'elle avait encore larges et solides, elle l'emporta hors des murs de la cité à la barbe des sentinelles, ou avec leur complicité tacite. Pendant plusieurs heures, elle marcha en direction de l'ouest, jusqu'à ce que le bruit du ressac et les embruns trahissent la présence de la mer. Alors, elle se posta au-dessus d'un terrier de lapin et chuchota :

- Reste en arrière, et ne fait aucun bruit.
Observe, et apprends.

Thécléote s'accroupit dans le sable frais, intrigué et frissonnant sous la bise nocturne. Le ciel était plein d'étoiles pâles, annonciateur du lever prochain d'un premier soleil. Curieux, il se demandait combien de temps durerait l'attente. Il comprenait – ou croyait comprendre – le rapport entre cette technique de chasse et Grior, mais trouvait la démonstration... un peu simpliste. Oh, grand-mère, tout ceci était-il bien nécessaire ?

Une heure s'écoula. La lumière croissait sans discontinuer. Thécléote baillait suffisamment fort pour que Layne se retourne vers lui et dise d'une voix douce, mais ferme :

- Thécléote, tu as fait du bruit. Le lapin est reparti au fond de son terrier. L'heure qui vient de passer est perdue...
Nous repartons de zéro. Garde le silence.

Vexé, il décida de ne plus bouger jusqu'à ce que grand-mère attrape sa proie. Une nouvelle heure s'écoula. Il était resté parfaitement calme, figé, mais le froid le perturbait et un début de crampe élançait douloureusement dans le bas de son dos. La deuxième heure était largement entamée lorsqu'en bougeant pour faire circuler son sang, il bascula en arrière et roula les quatre fers en l'air dans un buisson !

Sans manifester la moindre impatience, Layne dit alors :

- Thécléote, tu as encore alerté le lapin. Il s'est caché profondément, nous devons tout reprendre depuis le début. Nous en sommes à trois heures d'affût... pour rien.

Mortifié, il se massa les muscles endoloris et demanda :

- Mais... combien de temps doit-on attendre ? Ta proie, elle sortira quand ?

- Dans quatre heures, à peu près. Un peu plus, un peu moins... nous verrons.
Ne bouge plus, d'accord ?

Quatre heures ! Il maudit l'engeance lapine, responsable de tous ses maux ! Pourquoi la nature avait-elle doté ce foutu animal d'une mémoire aussi performante ? Quatre heures, bon sang... quatre heures sans émettre le moindre son ! Il n'était pas du tout certain de tenir ! C'était donc ça, la chasse ? Tu parles d'une corvée !
Mais la détermination de sa grand-mère l'aiguillonnait : son honneur de petit mâle était en jeu. Il résolut de réussir le test, quitte à souffrir le martyr !

A nouveau, il patienta. Les heures s'écoulant, ses crampes revinrent, plus douloureuses et sévères encore. Il frissonnait, il m'engourdissait, il contenait ses gémissements et son envie pressante d'aller uriner, d'aller courir, d'aller marcher, d'aller faire quelque chose, n'importe quoi, plutôt que prendre racine en silence ! C'était incroyablement pénible et difficile, pour le moush'tin. C'était aussi incroyablement formateur, mais ça, il ne le savait pas encore

Quatre heures passèrent. Il faisait grand jour, et à la bise du matin s'était ajouté le rayonnement cruel d'un soleil. Thécléote avait froid partout, mais sa truffe cuisait. Pas de lapin en vue. Serrant les dents, il persistait dans le silence et l'immobilité. Vers la cinquième heure d'attente, il commença à voir des étincelles et des papillotes danser sur le paysage ; son aspect ou son expression durent inquiéter Layne, car elle fronça les sourcils et le regardant, dit soudain :

- Tout va bien, mon lapin ?

Mon lapin ? comment ça...? Interdit, il ouvrit des yeux ronds tandis qu'elle se levait et poursuivait en le gratifiant d'un sourire narquois :

- Bien, tous les deux avons attrapé ce que nous étions venu chercher, je crois. Nous pouvons y aller. Je suis fière de toi, Thécléote. Tu sais t'inscrire dans la durée...
...quand tu veux.

En revenant vers Jypska, ma grand-mère décocha négligemment une flèche et tua un beau lièvre à plus de cent pas de distance.


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Sukra 13 Dasawar 1508 à 15h09

 
Nelle ouvre de grands yeux étonnés lorsque Antiorn parle de sa parenté avec le poète, mais afin de ne pas l'interrompre, elle ne fait aucun commentaire et retient ses questions.
Se resservant discrètement une nouvelle tasse de thé, elle se radosse de nouveau confortablement sur son siège et écoute la nouvelle histoire qu'il lui propose... Elle l'écoute d'autant plus attentivement que celle-ci n'est pas un classique conte tiré comme souvent de l'imaginaire, mais bel et bien une histoire véritable dont elle connaît l'un des protagonistes... elle prend donc une toute autre dimension !

Nelle laisse échapper un rire spontané au moment de la chute de l'histoire, puis quand le Nelda termine, elle s'exclame :


Mon lapin ! Le poète ! Hi hi !
Ainsi Thécléote est votre cousin ? Je n'en savais rien !

Enfin, toutes mes condoléances pour votre grand-mère..
. Ajoute-t-elle un peu précipitamment, réalisant qu'elle rigole d'une histoire racontée lors d'une veillée funèbre... Il ne manquerait plus qu'elle froisse son interlocuteur par manque de délicatesse...

C'était manifestement une guerrière d'une grande sagesse.

Nelle se demande si elle doit à son tour raconter une nouvelle histoire, puisque le chambellan lui en a offert deux, par ailleurs sans lésiner sur leur qualité... Difficile de rester à la hauteur d'une telle prestation, surtout devant un véritable public, à en juger par le nombre d'exclamations et d'applaudissements qui ont parsemé la salle de l'auberge...

Elle lui jette donc un regard vaguement interrogateur, tentant de deviner ce qu'il attend d'elle.
Nelle songe qu'elle est en tout cas définitivement ravie d'avoir rencontré ce chambellan, qui lui offre enfin de la Confrérie un autre visage que celui fait d'hypocrisie et d'artifice qu'elle avait rencontré jusque là...



 
Antiorn

Le Sukra 13 Dasawar 1508 à 16h41

 
*** Antiorn capta le regard de la tchaë. Le gentil géant sourit. ***


Vous n'avez pas à me donner la pareille, propage. Cette histoire était gratuite. Je ne vousdrais vous soumettre à une pression malvenue. J'ai fait des caravanes mon métier et mon service aux miens, les histoires et la musique sont ma passion. Semer la chimère au gré des routes et collectionner les mélodies et épopées sur mes nombreuses traces est aussi primordial pour moi que respirer.

*** Saluant l'assemblée d'un geste théâtral, le chambellan reprit place sur son siège qui geignit sous son poids. Face à l'âtre, son pelage clair se colorait de teintes orangées changeantes. Lentement, rituellement, il se versa une nouvelle tasse de thé. La levant dans les airs en direction de Nelle, il lança simplement: ***


Aux rencontres, puissent-elles être nombreuses.

N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Luang 15 Dasawar 1508 à 00h21

 
Et bien, c'est une belle passion et un besoin fort honorable, chambellan. Je les partage un peu, bien que je sois plus douée pour écouter que pour raconter, chanter ou jouer un air...

Levant à son tour sa tasse de thé pour ce drôle de toast, Nelle ajoute :

Aux rencontres, et à celle-ci particulièrement.

Puis après avoir bu une gorgée de thé, elle demande, curieuse :

En tant que caravanier vous avez dû beaucoup voyager, non ?
Et faire beaucoup de rencontres ?


En posant ces questions, Nelle se rend compte qu'elle serait bien incapable de donner un âge à son interlocuteur... Son air doux, son allure posée, et l'aura de sagesse et de patience qu'il dégage, ajoutés à la clarté de son pelage lui donnent la prestance d'une personne d'âge mûr... sans pour autant que le poids des ans n'accable son visage comme c'est parfois le cas, surtout pour les grands voyageurs...

 
Antiorn

Le Luang 15 Dasawar 1508 à 15h56

 
*** Antiorn acquiesça à la question de la propage. Elle était de ces êtres qu'il appréciait. La sagesse et l'émerveillement. Laïeule et l'enfant réunis en un seul être. ***


En effet, les voyages m'ont mené aux quatre coins de Syfaria. Je dois avouer que les landes sauvages me fascinent autant que les villes des différentes factions. Il y a dans la solitude et dans les paysages grandioses une rencontre qui s'ancre parfois plus profondément dans mon être. Contempler Syfaria rend humble, nous rappelle notre petitesse. N'allez pas croire que je parcours les terres en chassant les engeances. Je n'ai jamais levé la main sur quoi que ce soit. J'ai simplement appri à me soustraire aux dangers. À me fondre dans le décor. Dans cette fusion s'effectue une certaine communion qui est devenue au fil des ans un besoin.

Mais pour revenir à votre question, oui, j'ai rencontré maints poussiéreux. Des plus intéressents aux plus vains. Et ce, presque partout. Cela me dit que la nature poussiéreuse, malgré les différentes races et faction, est à la fois vaste et similaire. Paradoxe intéressant, non ?


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Julung 18 Dasawar 1508 à 00h33

 
Nelle acquiesce avec conviction aux paroles du nelda, les yeux un peu rêveurs. Pour sa part, elle aimerait bien que la communion soit aussi simple que ce qu'elle paraît dans la description qu'il en fait...

Sa question sur la nature des poussiéreux éveille cependant d'autres sentiments, encore plus profonds.


Vaste et similaire, oui... bien que mon expérience de ce monde, et de la nature poussiéreuse, soit bien plus restreinte que la vôtre, je crois que je suis assez d'accord avec votre sentiment...
Ce paradoxe se retrouve même à l'échelle individuelle, d'ailleurs...


Peut-être parce qu'elle discute avec un nelda réfléchi et attentif, curieux et attentionné, à l'écoute comme prêt à partager... Nelle songe à son père avec une soudaine mélancolie.
Antiorn lui rappelle, pour certains aspects, le papa, le nelda rassurant dont la petite tchaë guettait inlassablement et avec un enthousiasme exalté le retour.
Elle songe à cette nouvelle facétie du destin qui les a de nouveau envoyés sur des routes différentes, qui lui donne parfois le sentiment de le connaitre moins bien que certains inconnus...
Nelle songe qu'elle aimerait qu'il soit là, à boire un thé et discuter avec eux, avec cette sérénité qui le fuit... ou qu'il fuit...

Elle songe que Saltis apprécierait sans doute cet Antiorn... mais n'en montrerait rien... qu'au contraire il s'arrangerait certainement pour tout gâcher.


Oui, la nature poussiéreuse est pleine de paradoxes, et ce quelle soit la race ou la faction, j'en suis convaincue... Dit-elle finalement d'une manière laconique en s'absorbant dans la contemplation de sa tasse de thé.

 
Antiorn

Le Julung 18 Dasawar 1508 à 02h58

 
*** Le blanc nelda se recala dans son fauteuil, thé à la main, et lança de façon débonnaire: ***


Lorsque j'en viens à ne trouver aucun paradoxe en une situation ou en une rencontre, j'en viens à m'en méfier... comme si cela n'était pas naturel. La nature de ce monde est paradoxale. La nature des êtres qui y vivent l'est. L'existence même de chaque faction est basée sur un paradoxe. Vie et déclin chez le Matriarcat, liberté et unisson de culte ou philosophie chez les vôtres, individu et collectivité chez les miens... sans oublier que nous nous trouvons au sein de la faction possédant sans aucun doute le plus puissant corps armé de toutes les factions tout en étant celle qui craint le plus les autres. Seuls les Hauts-Rêvants semblent ne pas se contredire. Et c'est là vous dire à quel point ils me troublent ! Et de surcroît, mes parents sont nés à Jypska !

Oui, s'il est une chose à laquelle nous n'échapons pas, c'est bien la contradiction. Elle est encrée en notre nature. Nous sommes, êtres de poussière, dualité. Du moins c'est ce qui me semble. Si je vous ennuie avec ma philosophie, je vous prie de me faire signe,


N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Julung 18 Dasawar 1508 à 18h15

 
Nelle relève les yeux vers le nelda, subitement de gênée et chagrinée de réaliser que sa soudaine mélancolie est interprétée comme de l'ennui ou de la lassitude.

Non non messire, vous ne m'ennuyez nullement, rassurez-vous !
Pardonnez-moi, votre analyse, à laquelle j'adhère plutôt grandement, éveillait quelques pensées dans lesquelles je me suis égarée un instant.

Mais bien au contraire, je trouve cette discussion pour le moins atypique très passionnante.
Mais dites-moi, quelle serait, selon vous, votre dualité... votre contradiction ?


Nelle se rend compte un peu tard, après avoir posé la question, que celle-ci est sans doute un peu trop indiscrète... Leur échange est jusqu'à présent mené avec une franchise et une absence de faux-semblants qui en fait toute sa valeur et son intérêt, mais est-ce bien une raison pour pousser aussi loin l'exercice ?
Un peu tard pour s'en préoccuper, cela dit. Et puis si c'est le cas, elle songe, ou espère, qu'il le lui fera sans doute savoir sans trop s'en formaliser.
D'ailleurs, sans parler d'indiscrétion, Nelle songe avec encore un temps de retard que s'il lui retournait la question elle serait bien en peine d'y répondre...

Un peu rosissante, Nelle termine la théière en se resservant une tasse.


 
Antiorn

Le Julung 18 Dasawar 1508 à 22h06

 
*** Antiorn gloussa un bref instant, visiblement ravi de la question. Cet échange évitait les banalités, ce qui n'était pas pour lui déplaire. Les meilleures rencontres se faisaient en toute franchise. ***


Ma dualité à moi se trouve entre mes devoirs et ma liberté. Mon amour pour Arameth et mon besoin de m'en sauver. Mon amour pour la fuite et pour mes chaînes. ëtre chambellan des caravanes demande un temps fou qui jadis m'appartenait. Je ne sais comment je ferais sans la symbiose.


*** Le nelda sourit mélancoliquement, le regard perdu dans les flammes vascillantes de l'âtre. ***


Et vous ? Quel est l'élément, dîtes-moi, qui lie en vous l'essence de la poussière ?

N'est impossible que ce à quoi on se défend de rêver...

 
Nelle

Le Sukra 20 Dasawar 1508 à 19h15

 
A son grand soulagement, le Chambellan ne s'offusque pas de sa question, et se prête même à ce jeu avec franchise et sincérité.
Et avec une lucidité et une capacité de recul qui étonne la jeune tchaë.
Car oui, à son grand désarroi, il lui renvoie la balle, de façon très prévisible... Et Nelle s'en retrouve bien embêtée...

Touillant machinalement sa tasse de thé, Nelle réfléchit, cherchant avec le même sérieux que son interlocuteur une réponse à cette question...


Et bien... c'est drôle, mais malgré les apparences la question est loin d'être évidente... En tout cas je ne me l'étais jamais posée.
Et s'il y a bien un exercice difficile, c'est celui-ci, entre autre, de faire une telle introspection...

Peut-être... peut-être ma dualité n'est-elle pas très éloignée de la vôtre... Voyez-vous, je suis à la fois remplie d'une dévorante curiosité, qui me pousse à voyager, à découvrir, à rencontrer les lieux et les personnes qui constituent notre monde... Mais je suis également quelqu'un de très sentimentale, et j'ai pour ainsi dire la manie de m'attacher aux lieux et aux personnes de valeur que je ne manque pas de rencontrer...
A Korsyne, je me suis laissée imprégnée de cette ambiance spirituelle et lascive des Haut-Rêvants, essayant de m'identifier à travers leur culture, leurs croyances, leurs envies et leurs espoirs...


Knüt dit :
A tel point qu'elle a même arpenté leur deuxième monde avec certains d'entre eux...
Un peu plus et je te parie qu'elle arrêtait de s'épiler...


Sans doute habituée aux commentaires stupides de son mou, Nelle continue sans y prêter attention.


A Farnya et Oriandre, je me sens Soeur du Désordre... Je suis née ici, et à chacun de mes voyages je découvre un peu plus cette culture et ce peuple qui ont été miens un court moment.

Knüt dit :
A tel point qu'elle se tap...


L'équivalent mental d'un (douloureux) coup de coude dans les côtes, et Knüt termine sa phrase par un toussotement à moitié glapissement, avant de disparaître soudain. Les joues un peu plus roses que la normale, la jeune tchaë enchaine avec naturel.


Ainsi, chaque départ est à la fois une joie et un déchirement... La perspective d'aller à la rencontre de nouveaux horizons se dispute à la tristesse de quitter des amis et des endroits devenus familiers...

Voilà...
Conclue-t-elle en souriant et terminant sa tasse de thé.

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