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Maelia se levait a peine quand le Clairvoyant poussa les portes de l'antique bibliothèque.

Il se dirigea silencieusement vers l'alcove reservée aux Transcripteurs ou son ouvrage l'attendait.
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Après une bonne nuit de repos, la Gardienne se dirigeait vers l'Université pour y retrouver Sirilius.
La jeune Nelda avait l'esprit aiguisé par la Carnine qu'elle venait de fumer. Pas suffisamment pour entrer en transe mais assez pour que ses sens soient en alerte.

Une entrée dans l'Université, elle demanda à ce que l'on la conduise dans la salle des Transcripteurs. Une Nelda l'accompagna avec grâce.

Neira frappa doucement avant d'entrer. Siriluis lui tournait, le dos. Il semblait absorbé dans son travail. De sa voix douce, Neira le salua. ***

*** Le Clairvoyant était plongé dans d'antiques traités de musique onirique. ***

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*** Alors qu'il fredonnait une curieuse mélodie, la Gardienne s'introduit.

Il releva le museau de sa partition et salua la Rêvante. ***

*** Le jeune magister sortit, d'une petite armoire en bois précieux, un parchemin noircit de glyphes saccadées qu'il tendit a la Gardienne. ***

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La musique frappa tout de suite Neira, Elle aimait tant la musique et le fait de pouvoir danser il y a quelques nuits l'avait replongé dans cette magie qu'elle ressentait dans de pareils cas.
Son cerveau enregistra la mélodie et elle se promit d'y repenser plus tard.
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Elle regarda tout les anciens ouvrages qui s'y trouvaient. Et reprit songeuse.
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Quand on lui tendit un parchemin, elle s'en saisit délicatement pour l'observer intensément. Mais les glyphes ne lui parlaient pas ou si peu.
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*** Le Clairvoyant, encore absorbé par sa musique, regarda distraitement le parchemin que la Gardienne tenait, d'ailleurs, a l'envers... ***

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*** Puis, reprenant ses esprits. ***

*** La discussion au Shamesha lui revint en mémoire. ***

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En écoutant le Transcripteur, Neira ouvrit grands les yeux. C'était là une chose totalement nouvelle pour elle et on peut dire que cela l'angoissait un peu.
Tout cela lui paraissait singulièrement compliqué, elle qui ne se servait quasiment que de son intellect ...
Une nouvelle fois, Sirilius parla de musique. Cela lui parlait un peu plus, c'était toujours ça.
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La Gardienne réfléchit longuement en plissant le museau.
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*** Le Clairvoyant désigna a la Rêvante un siège patiné, gravé de runes et garni de coussins moelleux. ***

*** Sirilius laissa l´érudite apprivoiser lentement cette technique de méditation.
Une fois la Rêvante en harmonie avec le rythme, il reprit, doucement la parole. ***

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Neira fit ce qu'on lui demandait. Elle essaya de respirer lentement et de faire le vide autours d'elle, tout comme elle le ferait en état de transe.

Elle commença alors à ressentir ce dont lui parlait Sirilius, le rythme de son corps. Alors qu'elle pensait y être arrivé, elle se mit à penser à tout ce qui lui arrivait ses derniers jours: le navire, Ligerio, Syndal ... surtout Syndal.

Brusquement, la Gardienne ouvrit les yeux. Elle regarda Sirilius avec un petit air désespéré.
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*** Sirilius était légèrement surpris, il avait longuement observé la Gardienne durant sa méditation et avait pu percevoir une évolution tout a fait normale de son aptitude a l'écoute. ***

*** Le Clairvoyant fixa intensément l'érudite a la recherche du mystérieux trouble.


Il sourit puis, enfin, reprit. ***

*** Le gris Rêvant servit une infusion a la Gardienne,
elle serait arrivée a cette déduction elle même, tôt ou tard... ***

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La jeune Gardienne rougit subitement. Elle qui voulait ne pas évoquer sa relation avec Syndal la voyait s'étaler aux yeux de tous ...
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Neira referma doucement les yeux sans attendre la réponse du Clairvoyant.
Elle respira profondément et se retrouva dans le même état de plénitude que précédemment. Et là encore la pensée de Syndal envahit son esprit. Mais au lieu d'essayer de la repousser, elle l'accepta.
Il lui revint alors à l'esprit l'expérience qu'ils avaient partagé dans le Second Monde. Quand elle avait aidé son Aimé à trouver son chemin.

Alors, elle se senti en osmose avec elle-même écoutant chaque battements de coeur, chaque souffle ...
Neira n'était plus tout à fait là.
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Le Clairvoyant ne répondit pas...

Peu a peu, elle comprendrait,

La sublime beauté du rythme partagé...

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Il sourit et une lointaine image mentale se forma,

celle de ses propres parents, unis,

du plus profond de leur âme...
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Neira se trouvait dans un monde de sons. Elle entendait distinctement chaque bruits et pouvaient l'isoler des autres sons.
Les bruits de son corps d'abord. Puis elle perçut la présence de Sirilius, sa respiration calme et lente.
Ensuite c'est la pièce elle-même qui semblait lui parler. Elle était devenue une entité à part entière. Elle se promit de faire découvrir cela à Syndal.

La Gardienne ouvrit alors les yeux. Son regard était illuminé d'une sagesse nouvelle.
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*** Le Clairvoyant laissa la Gardienne s´approprier ce moment de plénitude.

Après un long silence, enfin, il lui dit. ***

*** Un jeune Suivant de Furm entra discrètement apportant des parchemins de Jypska puis un autre le suivit portant un plateau chargé de divers mets et d´eau claire.

Sirilius servit l´érudite, puis, lorsqu´ils semblèrent rassasiés, repris joyeusement leurs travaux. ***

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Trait déchirant les ténèbres.
D'un espace concret, sables et terres.
Balayé de flux délétères.

Cri de sang, perçant.
Traces, méandres du mensonge.
Guide des innocents.

Noirceur béante, profonde.
Danses espérées, salutaires.
Sur les pentes et dévers.

Brillant, lointain, élément incandescent.
Bastion non conquis, au fil du temps.
Noyaux de vérité, étincelle immatérielle.

Croisement incessant, virevoltants ressacs.
L'âme croit, chante sous la cataracte.
Choix guidés ou inconscients sur l'abaque.

Confusions, signes, vérités.
Galons du temps et des éveillés.
Onirisme dévoué mène à la beauté.

Peurs et espoirs malmenés.
Du corps affranchi, libéré.
Nait le Grand œuvre révéré.

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Neira écouta le récit avec intention elle ne comprenait rien aux mots mais elle essayait de se mettre au diapason du rythme du Rêve.
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Sans y prendre garde, elle avait tutoyé le Clairvoyant. Elle espérait qu'il ne le prendrait pas mal.
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*** Sans s'en rendre compte, la Rêvante battait la mesure de son panache caudal...

Elle apprend vite, se dit Sirilius, si elle continue ainsi nous pourrons bientôt passer a la vue... ***

*** Le Clairvoyant récita de nouveau le Songe, cette fois-ci sur un rythme plus calme.

Le battement onirique semblait, peu a peu, envahir toute la pièce... ***

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Comme il lui demandait Neira se concentra encore plus intensément. Ce dont elle avait parlé avec Ligerio lui revint en mémoire, la façon dont elle voulait utiliser la danse pour la transcription et la compréhension du runique de Tshal.

La jeune Gardienne se mit alors à onduler doucement. Ses pattes décrivaient de lents et vastes mouvements au dessus de sa tête. Son panache faisait la balance avec le reste de son corps.
La danse consistait en de lentes arabesques, les voiles de ses vêtements virevoltant autours d'elle comme une brume.
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*** La gardienne avait, visiblement, intégré le principe de rythme du Rêve, le Clairvoyant récita d´autres poèmes en runique de Tshall sur lesquels elle apposa son empreinte dansante...

Le lendemain Sirilius l´emmena près de la tente de Shaël pour lui montrer les signes peints sur d´antiques ruines éduennes. ***

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" Dans le désert les mots ont des contours nets...

Ils ont la consistance du vent et la saveur du sel...

Dans le désert les mots sont nus et blancs...

Éternels jalons qui parsèment la piste des sables...

Dans le désert les mots balisent le temps

Ils sont plus précieux que la pluie du printemps

Et gardent le secret et la mémoire des siècles défunts... "

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*** Sirilius laissa la Rêvante méditer ces couplets et se remit a travailler, a même le sable, les runes symbolisant la complexité de l´œuvre d´Asha... ***

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Les sages de Korsyne avaient conférés a Sirilius le titre de Maitre des runes,

Il avait maintenant la lourde charge de Transcripteur onirique,

Il pouvait donc légitimement accompagner ses frères et sœurs dans la transcription de leurs Songes et transmettre aux plus jeunes les connaissances dont Asha l´avait fait le dépositaire...
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Neira arpentait le Rêve, il se rappelait la profonde sensibilité musicale de la Rêvante aux runes de Tshal.

Le rythme du Rêve, musique onirique...

L´envoutante mélopée de la quête du Haut Dôme pourrait elle être inspirée par l´Art?

Le jeune Transcripteur se rappela les paroles de Shaël au Gardien du Naufragé:

"L´inspiration donne l´art. Et l´art donne l´inspiration..."

Le gris Rêvant sortit d´un grand coffre un bel instrument de musique,

un petit cavaquinho que lui avait confectionné l´Esculape Iandra, en d´autres temps.

Il frotta doucement les cordes se laissant emplir par ces nouvelles sensations...
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Une douce musique venait de la tente de Sirilius, Neira reconnut la sonorité caractéristique du cavaquinho. Elle avait emporté avec elle le Galoubet et Ttun-ttun de Ligerio. Elle se mit au rythme de celui du Transcripteur pour prendre le contre chant de sa mélodie.
Elle entra dans la tente avec sa grâce coutumière.
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*** Le Transcripteur laissa les dernières notes s´envoler a l´entrée de la Gardienne... ***

*** Sirilius indiqua une place confortable a sa soeur Rêvante. ***

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Le gris Rêvant fit, très doucement, vibrer les cordes de l´instrument. Il ne fallait pas incommoder le calme du Shamesha... ***