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Rameau de brume

Loi d'Argile

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Sujet lancé par Pavel Ivor
Le 01-10-1507 à 12h18
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Posté par Pavel Ivor,
Le 01-10-1507 à 12h18
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Pavel Ivor

Le Luang 1 Otalir 1507 à 12h18

 
Le Sourd, après mûres réflexions, pense qu'il serait judicieux de rappeler aux apôtres symbiosés les us, les coutumes, les moralités, les lois qui sont les nôtres.

La première de nos lois, notre pierre de touche, comme vous le savez, est la Loi d'Argile. La Mère de toute autre loi. Là voici...




Loi d'Argile



Au début fut le Grand Nulle Part, et du Grand Nulle Part vint l'Exode. Le trouble était grand parmi la multitude. Tous savaient que ce qui avait été n'était plus. Et parmi eux, beaucoup pensaient que ce qui serait, nul ne serait là pour le conter.

Telle la rivière en crue, les Piliers de Nulle Part dégorgèrent leur masse brouillone et effrayée. Le nouvel arrivant ne reconnaissait pas le visage de son voisin, les langues étaient multiples et l'incompréhension totale. Les êtres cherchaient des réponses pour apaiser leur fin. Les êtres cherchaient à survivre mais de leur peur venait leur trépas. Déjà, les effluves du S'Sarkh faisaient leur oeuvre.

De la multitude apeurée se distingua une petite fille. Ceux qui l'entouraient ne l'avait jamais entendu prononcer une parole. D'ailleurs, ils ne firent pas bien attention à elle. En vérité, ils ne la remarquèrent que lorsqu'elle disparut.

La petite fille n'aimait pas la peur et la colère. La petite fille n'aimait pas voir les êtres souffrir de leur souffrance. Aussi, elle s'enfonça dans la forêt dense, là où tout était calme. Des lunes durant, elle vécut seule, tout du moins, c'est ce qu'en auraient dit les êtres. Mais la petite fille n'était pas seule. Tout autour d'elle bruissait doucement telle une tendre et chaude mélopée. Elle observait l'hirondelle, le renard, le gambol et elle comprit que tout avait un sens, que la peur était inutile car la place des êtres étaient tout à la fois évanescente et éternelle. De la vie jaillissait la beauté. Et si la vie vallait la mort, la mort perpétuait la vie. Le vide définitif que voyaient les êtres n'était qu'un voile corrompu qui gangrenait les yeux des êtres comme les mignons du S'Sarkh voilaient chair et esprit. Il suffisait d'être attentif pour que votre coeur déborde de joie.

Les baies et les racines et la bonne eau ruisselante avaient fait grandir la petite fille. Elle poursuivait son chemin de solitude entourée. Tandis qu'elle contemplait le vaste ciel et les créatures qui la peuplaient, un visage bienveillant se formait dans les nuages. Les traits du visage maternel rayonnaient de joie alors que les yeux chauds de la dame des nuages contemplaient la petite fille. Quand le visage était là, la petite fille savait quel sentier arpenter et elle en remerciait le visage. Peu à peu, la petite fille apprit à regarder et à écouter avec attention. Les fleurs, les animaux, le vent avaient beaucoup de choses à dire. Et ils nourrirent la petite fille de leur babille car rares étaient les êtres qui savaient écouter.

Les lunes passèrent encore et la petite fille n'y prêtait pas attention. Mais un jour, la petite fille se mit à saigner et son coeur s'emplit de tristesse car elle sentit qu'elle n'était plus une petite fille. Elle rejoint une mare d'eau claire pour se laver. Le sang se mêla dans la mare en de pourpres fumerolles aqueuses et ce qui fut la petite fille se sentit mieux. Soudain, elle sentit qu'une présence formidable avait envahi tout ce qui se trouvait autour d'elle mais aussi en elle. Des lettres se formèrent de son sang dans la mare et ce qui fut la petite fille lut son nom sans difficulté: Sardoryanne.

Sardoryanne remercia ce Tout qui était la Dame Grise et rejoint les êtres car ils avaient besoin d'elle.

Dans la tanière des êtres, la confusion persistait. Beaucoup était devenu poussière et ceux qui ne l'étaient pas s'en inquiétaient. Certains cherchaient les questions, d'autres prétendaient détenir les réponses. Les uns disaient que le ciel était de saphir, d'autres d'azur. Certains saluaient de la main droite et d'autres de la gauche. Pour tout cela, les êtres s'injuriaient mais cela était inutile car leur langue n'était pas la même. Les hommes se battaient pour les femmes et les femmes se battaient pour tout.

Sardoryanne se présenta et dit: N'ayez crainte de ce qui est Autre car ce qui est Autre est Elle et chacun fait partie d'Elle. Nous sommes sa chair et ses enfants et ses yeux.

Qui est-elle? demanda un être. Sardoryanne répondit: Elle est la Dame Grise. Celle que tu trouveras entre noir et blanc, entre chien et loup, à l'aube comme au crépuscule. Elle est celle qui parle la langue de tous et qui regarde le passage du temps avec bienveillance car Elle sait que le temps passe mais ne se perd pas. Elle est celle qui refuse la corruption et la perfidie et la fracassure. Mais Elle est aussi celle qui rejette le vide et le temps figé. Elle est tout ce que tu vois autour de toi mais elle est aussi ce que tu es car tu es en Elle. Elle est la représentation et le sujet. Si tu l'aimes, c'est que tu es en paix avec ce qui est autre et avec toi-même...

Certains êtres écoutèrent Sardoryanne avec attention mais s'éclipsèrent peu à peu. L'un prétextait qu'il n'avait pas encore trouvé de gibier et que sa femme le houspillerait s'il revenait les mains vides. L'autre répandit sa salive au sol et conjura le mauvais sort en appelant la protection de ses dieux terribles.

Indifférent à Sardoryane, les êtres ne virent pas les malheurs arriver. Pourtant, Sardoryanne savait écouter ce que Nature avait à dire et mettez en garde les êtres aussi souvent que possible. Quand la terre fut rendue noire et craquelée par le passage des feux de malheurs, quelques êtres revinrent à Sardoryanne.

Sardoryanne, Sardoryanne, vous n'avons pas su écouter tes conseils. Les morts sont maintenant plus nombreux que les vivants et leur âme est en peine. Qu'avons nous fait pour mériter ce triste sort?

Sardoryanne répondit: Personne ne mérite destin cruel. La Dame Grise ne vous punit pas. La Dame observe et vous souffle de ne pas souffrir de votre souffrance. Lorsque vous aurez compris cela, Nature redeviendra bienveillante.

Mais comment ne pas souffrir de notre souffrance, Sardoryanne. Je ne peux rire aux éclats alors que mon fils est parti dans l'au-delà soupira un être.

Sardoryanne répondit: En tout chose, cherches l'Equilibre. N'agit ni vers le Bien, ni vers le Mal, car alors tu souffriras de ta propre souffrance et ton Bien comme ton Mal se retourneront contre toi. L'action juste est celle qui est mélodieuse. Vois le chant de l'oiseau. Le clapotis du ruisseau. Ecoutes la mélopée de Nature. Elle n'agresse pas les tympans de ton âme car elle est à sa place. Toi-aussi, tu peux tenir ta place et sentir l'harmonie. Quand cela sera, tu seras en paix. Ton ventre sera plein et ton visage souriant. En revanche, si tu trompes les Lois de l'Equilibre, ton âme se fracassera d'elle-même. Et la Dame sera triste pour l'enfant égaré.

Quelques êtres, assis en tailleur, furent transportés par les mots de Sardoryanne. Car en leur coeur venait de vibrer l'Equilibre. Ils pleurèrent pour les erreurs passés et l'aveuglement. Une fois que la dernière larme mouilla le sol, leur peine s'en était allée et un vent nouveau caressait leur face réjouie. Ils commençaient à entendre le chant de Nature.

Trois d'entre eux s'agenouillèrent devant Sardoryanne et dirent: Vénérable Sardoryanne, tes mots apaisent nos coeurs et nous voyons maintenant le monde sans brume. Nos yeux sont ceux de l'enfant. Parles nous de la Dame. Nous te suivrons partout et louerons Ses grâces avec toi.

Sardoryanne répondit: L'Equilibre vous est apparu. La Dame vous a reconnu et vibre dorénavant en vous. Sardoryanne se leva et embrassa les trois êtres car à travers eux, elle embrassait la Dame. Sardoryanne n'était plus seule. Elle dit: Vous serez mes Oljads. Comme la mienne, votre parole sera sacrée, car la Dame parle à travers vous. Tout comme moi, la Dame vous a choisi pour enseigner l'Equilibre aux êtres.

Sardoryanne et les Oljads poursuivirent leur chemin pour diffuser l'Equilibre dans le coeur des êtres. Mais la langue des êtres était multiple et ces derniers ne comprenaient pas toujours la Sardoryanne. Après que les enfants de la Dame furent chassés d'un village, un Oljad constata: comment faire comprendre à un être que dans le chant de la cascade se trouve le Beau et la Dame, si l'être à des oreilles de gambol? Sardoryanne répondit: les êtres ont souffert de leur souffrance et n'écoute et comprenne que le requiem qui voile les yeux. Enseignons leur le langage de Nature pour que les êtres sachent écouter et lire de la Dame. Les Oljads se réjouirent et demandèrent: Sardoryanne, comment dit-on mère dans le langage de Nature. Sardoryanne écouta le bruissement des arbres autour d'elle et dit: Shaïm. Alors, les Oljads se réjouirent et dorénavant Sardoryanne devint la Shaïm pour eux.

Les lunes passèrent et la Shaïm répandit la langue maternelle autour d'elle, le Shaïran. Les êtres commencèrent à s'écouter et ne souffraient plus de leur souffrance. La multitude s'unit autour de la Dame Grise et cherchait l'Equilibre en toute chose.
La joie débordait des coeurs et la douce vibration de l'harmonie dura quelques temps. Tydale, Nelda, Tchaë et tout ce qui était de faune et de flore vivaient dans la quiétude.

Un jour, un apôtre vint trouver la Shaïm Sardoryanne et dit. Shaïm, loué soit la Dame Grise, je vous trouve enfin. Ma maison se trouve par delà les collines, et les montagnes et les plaines. Je prie la Dame Grise mais j'ai parfois l'impression qu'elle me délaisse. Jusqu'où s'étendent les bienfaits de la Dame?

Sardoryanne répondit: La Dame est partout car Elle est ce qui est Autre et ce qui est toi. Elle est le sujet et la représentation. Ses caresses et son chant s'étendent là où tes yeux se portent et plus encore. Tu la portes en toi. Les Lois de l'Equilibre n'ont pas de frontières.

Plus tard, un apôtre vint trouver la Dame et dit: Vénérable Shaïm, loué soit la Dame Grise, je consacre ma vie à la Dame et vis à Syrinth. Les étrangers y affluent et leur langue me perturbe. J'ai l'impression que nous ne nous comprenons pas.

Sardoryanne répondit: Tous ne suivent pas la voie de l'Equilibre. Le loup effrayé ira te mordre alors que le brave chien ira reposer sa truffe entre tes mains. Nous devons nous montrer patient le temps que le loup effrayé devienne chien. Mais si par son vol, l'oiseau peut voler partout où ses ailes le portent, il a néanmoins son nid. Ainsi, pour respecter l'Equilibre, Zarlif sera la Glorieuse et les étrangers y seront accueillis avec bienveillance, pour que le loup effrayé devienne chien. Syrinth sera la Sainte et le nid de l'oiseau.

Les jours passèrent et Equilibrium brillaient de mille feux. Le S'Sarkh en conçut de la jalousie et lança ses effluves sur les Apôtres et les étrangers. Certains se laissèrent emporter et travaillèrent à briser l'Equilibre.

Soucieuse, la Sardoryanne réunit les Apôtres et dit: La Dame souffre du S'Sarkh. Il est le ver qui la ronge. Il est le ver qui nous ronge. Parce que l'arbre qui s'étouffe lui même doit apprendre à se pardonner pour obtenir le pardon de la Dame, pénitence doit être faite face à la Corruption, la Perfidie et la Fracassure...




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